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Hélène Flautre Députée  européenne (Verts) nous transmets ce dossier :
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Réaction des verts


La politique de l'Union européenne envers la Palestine
depuis les élections palestiniennes du 25 janvier 2006:

 

1) Les conditions fixées par la Communauté internationale et l'Union européenne pour la poursuite des aides internationales suite aux élections palestiniennes:

 

Suite aux élections, les différentes Institutions européennes et la Communauté internationale ont avant tout salué le bon déroulement démocratique des élections palestiniennes tout en manifestant des doutes quant à la capacité du Hamas à participer au processus de paix. Le Hamas est considéré par l'Union européenne comme une organisation terroriste. La Communauté internationale et l'Union européenne ont fixé des principes que le Hamas doit respecter sous peine d'être privé d'aides de la Communauté internationale.

 

Ø         Décision du quartette du 30 janvier 2006 (ANNEXE 1)

 

Le quartette (Russie, ONU, UE, États-unis) s'est réuni à Londres le 30 janvier 2006 afin de s'exprimer sur la situation suite aux élections palestiniennes. Le quartette, après avoir félicité le peuple palestinien pour le déroulement libre et démocratique des élections,  a expressément annoncé que la poursuite de l'aide internationale dépendait de la reconnaissance par le Hamas de trois principes:

 

- l'arrêt de la violence comme moyen de régler le conflit

- la reconnaissance de l'Etat d'Israël

- le respect des précédents accords conclus par l'autorité palestinienne

 

Le quartette réaffirme sa position le 30 mars 2006 (ANNEXE 2) et annonce que la suppression de l'aide internationale aura des répercussions sur les aides directes versées au gouvernement et à ses ministres.

 

 

Ø          Les conditions du quartette sont réaffirmées par les Institutions européennes:

 

  • Le Conseil réuni en formation des affaires générales et des relations extérieures réaffirment cette position le 30 janvier 2006 (ANNEXE 3)

 

  • Le Parlement européen rappelle ces conditions dans une résolution du 2 février 2006   (ANNEXE 4) 

 

Le Parlement européen "réaffirme que l'engagement qu'il a pris de demeurer le premier pourvoyeur d'aide à l'Autorité palestinienne et de continuer à contribuer au développement économique de la Palestine et au processus démocratique du pays dépendra de la clarification de la position du nouveau gouvernement sur la dénonciation de la violence et sur la reconnaissance de l'État d'Israël; réaffirme également sa détermination à œuvrer en faveur de la paix et à coopérer avec tout gouvernement qui est prêt à recourir à des moyens pacifiques"

 

 

  • Le président du Conseil de l'Union européenne, Wolfgang Schüssel, a reçu le mardi 14 mars le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas et a affirmé que « L'Union européenne souhaite aider le peuple palestinien. Nous faisons confiance en son président et sommes amis du peuple. Nous respectons les résultats des élections du 25 janvier et reconnaissons la victoire du Hamas. Tout gouvernement élu démocratiquement est toutefois tenu de respecter certains principes afin de gagner la considération de la communauté internationale." (ANNEXE 5)

 

  • Javier Solana (haut représentant pour la PESC) est intervenu devant le Parlement européen le 5 avril 2006 (ANNEXE 6). Il a affirmé que le programme du Hamas était en l'état inacceptable pour la Communauté internationale. Les trois conditions fixées par le quartette ne sont toujours pas remplies.

 

  • Benita Ferrero-Waldner, commissaire européen pour les relations extérieures et la politique de voisinage a prononcé un discours au Parlement européen le 5 avril 2006 sur la situation au Moyen Orient. (ANNEXE 7).

 

La Commissaire annonce qu'il n'y aura plus d'aides directes au gouvernement palestinien tant que les conditions du quartette ne seront pas respectées. La Commissaire rappelle que l'Union européenne est consciente des besoins humains et économiques de la Palestine. Ainsi la Commission a débloqué le 27 février 120 millions de dollars pour la Palestine et elle continuera de répondre aux besoins humanitaires du peuple palestinien.

 

 

2) La décision de supprimer les aides directes au gouvernement palestinien.

 

 

La Commission européenne a suspendu son aide au gouvernement palestinien, dirigé par le Hamas, le  vendredi 7 avril. Cette position a été confirmée par le Conseil des ministres du 10 avril 2006:

 

 

Conclusions du Conseil des affaires générales et des relations extérieures du 10 avril 2006. (ANNEXE 8)

 

Le Hamas ne respectant pas les conditions fixées par le Conseil et le quartette, le Conseil décide que plus aucune aide directe ne sera versée au Hamas tant qu'il n'accédera pas aux conditions posées. L'Union européenne continuera à aider le peuple palestinien pour ses besoins les plus urgents.

 

"Les contacts avec les membres du gouvernement et les dirigeants politiques du Hamas doivent être exclus actuellement", a déclaré Ursula Plassnik, chef de la diplomatie autrichienne, au nom de la présidence de l'UE.
"Mais les contacts au niveau des services techniques ou administratifs, là où cela relève d'une nécessité inévitable, peuvent avoir lieu", a-t-elle noté. Le gel de l'aide directe visait à défendre les intérêts des contribuables en veillant à ce qu'aucune somme d'argent ne serve à financer la violence et le terrorisme.

 

 

Ø         La décision européenne concerne l'aide directe au gouvernement palestinien et le versement des salaires de fonctionnaires opérés avec des fonds de l'UE par l'intermédiaire de la Banque mondiale, mais non l'aide humanitaire venant d'organisations internationales et non gouvernementales.

 

Cette décision participe à un mouvement international. Washington a aussi annoncé la suspension de son aide vendredi et la Norvège s'est ralliée à la tendance samedi. Le 11 avril 2006 l'ONU a décidé de restreindre ses relations avec le gouvernement palestinien. Désormais, "les contacts politiques seront étudiés au cas par cas", a expliqué le  porte-parole du secrétaire général, Kofi Annan. Toutefois l'ONU continuera à entretenir des relations avec les responsables du Hamas pour la mise en œuvre des programmes humanitaires.

 

 

3) La répartition des crédits accordés par l'Union européenne avant les élections:

 

Les crédits accordés par l'Union européenne à la Palestine sont d'environ 500 millions d'euros par an. La Commission européenne finance à hauteur de 250 millions d'euros alors que les Etats membres fournissent le reste des crédits.

L'assistance financière accordée aux palestiniens en 2005:

Ø         192 millions d'euros pour les besoins immédiats de la population palestinienne

- 70 millions d'euros alloués à l'autorité palestinienne afin de soutenir les services publics et la réforme des Institutions.

- 122 millions d'euros pour l'aide humanitaire et aux réfugiés. Ces fonds sont attribués à l'UNRWA  (United nations Works and refugees agency)et à ECHO ( le bureau d'aide humanitaire de la Commission en Palestine)

Ø         40 millions pour l'établissement d'infrastructure

Ø         12 millions pour la mise en place d'un environnement favorable à la construction d'un Etat palestinien

Ø         35 millions pour le soutien aux services sociaux (éducation, services de santé...). Ces crédits sont alloués à la banque mondiale qui gère la répartition de ces fonds.

 

Voir: http://europa.eu.int/comm/external_relations/gaza/intro/index.htm#2.3

D'autres financements sont accordés par l'Union européenne en fonction des besoins constatés sur place. Ainsi en 2005, l'UE a accordé 60 millions d'euros supplémentaires pour aider à la reconstruction suite au désengagement de Gaza. De plus le 13 décembre 2005, l'UE a créé un fond de crédit de garantie UE Palestine, afin de supporter l'émergence de petites et moyennes entreprises, le financement de l'UE s'est élevé à 14 millions d'euros pour ce programme.

 

4) Prospectives des financements de l'Union européenne en 2006

 

Il faut tout d'abord relevé que ce sont les aides directes accordés au gouvernement palestinien qui sont visées par la décision. Aucune aide ne pourra transiter par le gouvernement palestinien. Il est pour l'instant trop tôt pour dire dans quelle mesure l'aide de l'UE sera diminué du fait de la décision du Conseil du 10 avril 2006. Cette décision peut être modifiée rapidement en fonction des réactions du Hamas.

La commissaire aux Relations extérieures Benita Ferrero-Waldner a affirmé que l'Europe continuerait à "se tenir aux côtés des Palestiniens" et fournirait des fonds pour l'électricité, l'alimentation, l'éducation et d'autres projets, afin que "leurs besoins de base soient pourvus dans l'avenir".

Les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne ont insisté sur le fait qu'ils chercheraient des alternatives pour financer des projets humanitaires.

 

Ø         La Commission européenne a accordé le 27 février 2006 (ANNEXE 9), 120 millions d'euros aux palestiniens afin de répondre aux besoins urgents de la population et de stabiliser le déficit financier du gouvernement. Ce financement est indépendant des futures aides qui seront accordées ou non selon que le Hamas respecte les principes fixés par le Quartette le 30 janvier 2006.

 


Réaction des verts:

 

Les verts condamnent cette décision (ANNEXE 10) et critique la différence de traitement de l'Union européenne entre la Palestine et Israël:

 

" La suspension de l’aide de l’UE apparaît comme une pression intolérable sur l’acteur le plus faible du conflit israélo-palestinien qui ne se double pas d’une pression équivalente sur l’acteur le plus fort"

 

"Les Verts condamnent la politique du pire choisie par l’UE, qui ne fera qu’exacerber la misère et le désespoir du peuple palestinien, au nom de principes vertueux qu’elle n’applique jamais que selon deux poids et deux mesures."

 

Lettre d'Hélène Flautre sur la suspension des aides directes de l'UE à l'Autorité palestinienne

Mme. Benita Ferrero-Wladner,

Commissaire aux relations extérieures

et à la politique européenne de voisinage

 

Mme. Ursula Plassnik,

Présidente du Conseil de l'UE

  

Bruxelles, 28 avril 2006

 

Mme Ferrero-Waldner,

Mme Plassnik,

 

Je vous fais parvenir ce courrier afin de vous faire part de ma désapprobation concernant la décision de suspendre l'aide directe de l'UE à l'Autorité Palestinienne.

 

Il est légitime que l'UE cherche à obtenir les garanties nécessaires afin de s'assurer que les fonds européens ne soient pas utilisés à des fins terroristes. Cette question avait d'ailleurs déjà été posée sous la Présidence de Yasser Arafat. Une enquête de l'OLAF avait alors démontré que de telles accusations étaient infondées. Il est tout aussi légitime que l'UE demande que le gouvernement palestinien, en tant que partenaire de l'UE, ne prône pas la destruction de l'Etat d'Israël et n'appelle pas à sa disparition. 

 

Cependant, il est regrettable que l'UE n'ait pas cherché à "juger sur pièce" et n'ait pas accordé le temps nécessaire au nouveau gouvernement palestinien pour clarifier ses positions. Il est tout aussi déplorable que l'UE n'ait pas cherché à établir un dialogue avec l'AP afin de l'encourager à adopter une déclaration allant dans le sens des exigences de l'UE. Les idées énoncées dans la charte du Hamas ne peuvent en aucun cas être acceptées par l'UE. Cependant, il eut été équitable et réaliste de la part de l'UE d'identifier des objectifs dont la réalisation conditionnerait l'aide, plutôt que d'établir une liste de pré-conditions à celle-ci.

 

L'UE, et plus particulièrement la Commission, n'a d'ailleurs eu de cesse de promouvoir une approche positive de la clause de l'élément essentiel. Selon cette approche, les termes des accords doivent être utilisés afin de mettre en place des mécanismes de suivi, de dialogue et de pression dans le but d'améliorer la situation, les sanctions intervenant éventuellement à l’issu du processus. Cette approche prévaut d’ailleurs dans la résolution adoptée par le Parlement européen le 2 février 2006 (élection en Palestine).

 

La décision de l'UE me paraît donc particulièrement malvenue- le fait qu'elle ait été annoncée par la Commission et le Secrétaire Général du Conseil avant même la réunion des ministres et sans considération des positions du Parlement européen fragilise encore sa légitimité. Cette décision semble avoir été prise sans aucune vision stratégique ni réflexion quant à un possible plan de sortie de crise. De plus, elle reste très confuse quant à l'envergure et au type de l'aide gelée.

 

Nul ne peut mettre en doute la transparence et la légitimité des élections palestiniennes. Le processus démocratique dans ce pays a été promu, soutenu, financé et observé par l'UE. Le comportement des palestiniens et leur volonté d'aller au bout du processus de démocratisation a d'ailleurs été exemplaire. Il est donc déplorable de constater que l'UE se met en porte-à-faux en refusant de reconnaître le nouveau gouvernement palestinien comme un interlocuteur à part entière. Une telle attitude décrédibilise l'ensemble de l'action de l'UE en matière de promotion des droits de l'Homme et des principes démocratiques, élément pourtant essentiel de l'action extérieure de l'Union.

 

Enfin, en gelant les aides indispensables au fonctionnement des ministères palestiniens, L’UE porte atteinte aux structures mêmes du futur Etat palestinien, qu’elle a pourtant très largement contribué à mettre en place.

 

Pour l'ensemble de ces raisons, et pour éviter une crise sociale et politique majeure et irréversible dans les territoires palestiniens, il me semble urgent que l'UE revienne sur sa décision, qu'elle fasse preuve de mesure et d'équilibre dans ses décisions et qu'elle s'assure de pratiquer la même règle pour tous ses partenaires.

 

Je vous serais également reconnaissante de me faire parvenir les informations précises concernant le financement et les projets gelés par l'UE et ses Etats membres, plus particulièrement ceux liés à la promotion des droits de l'Homme et aux réformes démocratiques.

 

En vous remerciant de l'attention que vous porterez à la présente requête, je vous prie d'agréer, Madame la Commissaire, Madame la Présidente, l’expression de mes salutations distinguées.

 

Hélène Flautre

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