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Le moment est venu pour
dissoudre l’Autorité palestinienne

 Khaled Mansour

Membre du Bureau politique du Parti du Peuple Palestinien

( 29 juin 2006 )

 L’arrestation de 8 ministres du gouvernement palestinien et de 21 députés du Conseil Législatif constitue une escalade dangereuse du plan israélien qui a pour objectif d’assujettir le peuple palestinien, réalisant ainsi ce que l’injuste blocus n’avait pas encore réussi à faire, c’est-à-dire, se débarrasser du nouveau gouvernement palestinien – considéré comme terroriste par Israël, par les États-unis et par quelques autres grandes puissances. Il s’agit là d’un prélude à la mise en exécution du programme d’Olmert pour proclamer de façon unilatérale les frontières définitives de l’État d’Israël, annexant 50% des territoires palestiniens occupés en 1967 où serait édifié l’État palestinien en adéquation avec les résolutions 142 et 338 des Nations unies. Cet acte porte le coup de grâce aux Accords d’Oslo dont la reconnaissance par le nouveau gouvernement palestinien est exigée par la communauté internationale.

Cette escalade israélienne constitue une opportunité pour l’ensemble des dirigeants palestiniens, qui, d’un commun accord entre leurs diverses composantes et en coordination avec les pays arabes, entreprendront une mesure courageuse et décisive et proclameront, par la voix du Président Abou Mazen, la dissolution de l’Autorité nationale avec toutes ses institutions (présidence, gouvernement, conseil législatif) ; en s’adressant à la communauté internationale pour lui faire porter la part de responsabilité qui lui incombe face à la situation et au devenir d’une population soumise à l’occupation directe ; en réclamant un système de protection internationale pendant une certaine période intermédiaire et limitée. Ainsi, cette mesure dissipera les illusions et les fausses conclusions du monde selon lesquelles la cause palestinienne n’est plus une affaire d’indépendance et d’abolition de l’occupation, mais plutôt une affaire de rivalités autour des prérogatives de l’Autorité palestinienne ou de litiges sur l’élargissement des divers secteurs du pouvoir.

Depuis sa naissance, l’Autorité palestinienne n’a cessé d’être une autorité aux prérogatives diminuées. Même pendant son âge d’or – selon l’appellation de ses partisans – il y a toujours eu un partage des fonctions entre l’autorité palestinienne et les autorités de l’occupation : les Palestiniens géraient leurs affaires civiles internes ainsi que quelques aspects de la sécurité intérieure, alors que les Israéliens régnaient sur la sécurité extérieure tout en intervenant quelquefois dans les affaires internes de la sécurité palestinienne. Aux débuts de la deuxième Intifada et avec l’invasion israélienne des territoires palestiniens sous autorité palestinienne, le rôle de l’Autorité palestinienne a été réduit et sa mission limitée à la gestion de la vie quotidienne des citoyens sans pouvoir exercer un rôle quelconque dans les affaires de la sécurité intérieure (en Cisjordanie surtout). Lorsque le mouvement Hamas fut investi du pouvoir à l’issue des dernières élections législatives, l’impuissance de l’Autorité devint totale, en raison de l’injuste blocus international imposé à notre peuple, l’Autorité n’ayant plus de rôle à jouer par manque de ressources financières.

Tant que l’occupation continue de peser sur notre peuple et continue de gérer les détails les plus infimes de notre vie, il est logique qu’elle prenne en charge les besoins de la population, ainsi que toute autre responsabilité, selon les lois internationales qui stipulent que l’occupant doit endosser les responsabilités de la population sous son occupation. En effet, nous ne devons pas dispenser l’occupant de son devoir ni les partager avec lui. Soit une occupation pleine et totale, soit une indépendance pleine et totale !

Prendre en charge la gestion de la vie quotidienne de la population, répondre à ses besoins multiples et accrus, constitue une lourde tâche qu’il est impossible à la direction palestinienne d’assumer – sauf dans le cas où elle jouirait d’une réelle autorité et d’une totale souveraineté. Or, l'ingérence de l’occupant et son appropriation de toutes les prérogatives de l’Autorité palestinienne suppose que cette dernière cesse d’assumer son rôle d’auxiliaire aux côtés de l’occupant en le déchargeant de ses obligations.

La direction palestinienne doit entamer immédiatement la mise en application de la charte de l’entente nationale, elle doit réunir le Haut Conseil en vue de redynamiser et de reconstruire l’OLP, afin que cette Organisation recouvre son rôle essentiel et concentre tous ses efforts à conduire la lutte du peuple palestinien pour la liberté, afin de pouvoir atteindre ses objectifs nationaux et légitimes concernant le droit au retour et à la libération, de mettre fin à l’occupation sous toutes ses formes, d’établir un État palestinien indépendant et souverain, avec Jérusalem pour capitale.

La décision palestinienne de dissoudre l’Autorité mettra le monde entier face à ses responsabilités, ramènera le dossier palestinien sur le devant de la scène internationale et au Conseil de Sécurité, mettra fin à la tutelle américaine qui dure depuis de nombreuses années et forcera l’intervention des institutions internationales pour contraindre Israël à stopper le processus de son plan unilatéral ainsi que ses crimes contre le peuple palestinien.

Inclure dans la proclamation de la dissolution de l’Autorité un appel à la protection internationale pendant une certaine période intermédiaire et limitée incitera le monde à assumer ses responsabilités envers le peuple palestinien, en vue de lui assurer d’abord la sécurité et la protection contre les exactions perpétrées de manière organisée et incessante par l’occupant israélien, et de procurer les fonds et les aides nécessaires pour couvrir les besoins de vie de la population.

 Traduit de l’arabe par Rania SAMARA

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