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Retour à une occupation corrompue

vendredi 3 août 2007
http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=2376

Amira Hass

Une des nouvelles inquiétantes de la semaine passée annonçait qu’Israël avait donné son accord pour le transfert de mille fusils en provenance de Jordanie et à destination des forces de sécurité fidèles à Mahmoud Abbas. Il était déjà arrivé qu’Israël autorise le transfert d’armement et de matériel de sécurité aux forces d’Abbas. Ce qui inquiète dans cette nouvelle, c’est que dans l’entourage d’Abbas, on continue de s’accrocher à l’illusion que l’échec de Gaza était purement et simplement « militaire », et c’est aussi que le Fatah persévère à faire ce qu’Israël et les Etats-Unis attendent de lui et qu’il a fait sans succès à Gaza : combattre le Hamas.

D’autres nouvelles inquiétantes nous sont encore parvenues ces derniers jours : il est à nouveau permis aux représentants israéliens de discuter avec des représentants palestiniens officiels à l’étranger ; Ehoud Olmert et Mahmoud Abbas se rencontreront prochainement et cette fois à Jéricho ; il y a reprise de la coordination et de la communication pour les questions civiles ; et un nouveau projet d’affaires américano-palestinien a été lancé à la Mouqata’a de Ramallah : le Président George Bush a approuvé un prêt de 228 millions de dollars en faveur de petites et moyennes entreprises palestiniennes, afin d’améliorer le niveau de vie des Palestiniens. « Les Etats-Unis se sont engagés à renforcer l’économie palestinienne comme une étape en direction de la paix », titrait le communiqué officiel.

En quoi ces nouvelles sont-elles inquiétantes ? Parce qu’elles nous apprennent que les affaires sont retournées à leur point de départ, c’est-à-dire au style « gestion de l’occupation » qui caractérisait les années 1994-2000 et auquel le mouvement du Fatah s’était parfaitement intégré : un gouvernement palestinien (à la légalité temporaire et branlante) accepté par Israël et l’Occident, un semblant d’existence de discussions, l’occupation qui se poursuit, les Palestiniens qui se querellent. Tout ceci avait conduit à l’éclatement du second soulèvement.

Ce n’est pas un membre du Fatah qui se trouve à la tête du gouvernement palestinien à Ramallah, mais l’esprit du Fatah, comme mouvement dirigeant, continue d’y régner, en même temps que ce qui l’a rendu insupportable à de si larges pans de la société palestinienne. Par exemple : Yasser Arafat avait gonflé sans besoin ses services de sécurité en y intégrant des fils de familles pauvres et des fils de réfugiés, dans le but de créer un large groupe de protégés fidèles en échange d’un pauvre mais indispensable salaire. Il espérait par là gagner leur soutien politique à son égard et à l’égard de son mouvement - sans rapport avec son impuissance politique face au processus israélien de colonisation et à la politique de bouclage et de séparation.

L’échec de cette tactique s’est illustré lors des élections de 2006. La manière dont les Etats-Unis et Israël misent sur « le renforcement des services de sécurité » d’Abbas nous révèle que la logique d’Arafat continue de guider les trois dirigeants [Bush, Olmert Abbas]] qui font du peuple palestinien, chacun à sa manière, l’objet de « gestes » - y compris sous la forme de salaires versés à des membres de la sécurité superflus. Comme si ce n’était pas la vie sous l’occupation israélienne qui était la cause de l’essentiel de la détresse mais une « pauvreté » tombée du ciel.

Sous couvert de ce qu’on appelle le « processus de paix », dans les années 1994-2000, et sous couvert du mantra qui veut que « le renforcement de l’économie palestinienne fera avancer la paix », beaucoup parmi les hauts responsables du Fatah et dans leurs sphères, ont vite fait de s’enrichir personnellement. Cela aurait bien sûr pu être légitime si la situation économique d’une part considérable des habitants des Territoires occupés ne s’était pas aggravée - du fait des limitations israéliennes imposées aux déplacements - et s’il n’était pas question des fonds découverts pour eux dans la caisse d’Arafat et de l’OLP ou par des voies plus douteuses. Il y avait trop souvent corrélation directe entre les liens du nouveau riche avec un des services de sécurité palestiniens et les liens des hauts responsables de ces mêmes services avec le Shabak [service israélien de la sécurité générale] ou de hauts responsables israéliens. Pareils liens avec de hauts responsables du Fatah et du Shabak procuraient des permis de déplacement, garantissaient la « réunification familiale » pour les uns et pas pour les autres, et ainsi de suite. Ces formes de protectionnisme et d’autres encore, toutes dépendantes de l’occupation, ont conduit les Palestiniens à établir un lien entre « processus de paix » et corruption.

Les échecs de 2006 et 2007 n’ont pas fait la démonstration que la leçon avait été retenue ni que le Fatah avait renoncé au système du protectionnisme et des occasions d’enrichissement et de vie facile - au milieu d’une mer de pauvreté croissante - occasions qui s’offrent à celui qui est un proche de la bonne personne.

Amira Hass - Ha’aretz, le 1er août 2007
Version anglaise :
Back to a corrupt occupation
Traduit de l’hébreu par Michel Ghys

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