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L'administration Bush est divisée
sur le dossier israélo-palestinien

Article paru dans l'édition du 14-15 octobre 2007

  Sylvain Cypel - CORRESPONDANT à NEW YORK

 

Condoleezza Rice, la secrétaire d'Etat américaine, fait du lundi 15 au jeudi 18 octobre, sa septième "navette" au Proche-Orient en dix mois. Objectif : préparer la conférence internationale centrée sur le conflit israélo-arabe qu'elle souhaite réunir. Le lieu est fixé : Annapolis, près de Washington. La date du 15 novembre a été évoquée. Mme Rice est déterminée à aboutir. Elle bénéficie du soutien du président Bush et des autres membres du Quartet (Nations unies, Union européenne et Russie). Mais les obstacles sont nombreux, intrinsèques au conflit israélo-palestinien et aussi internes à l'administration américaine.

 

Depuis l'intervention israélienne au Liban, à l'été 2006, peu appréciée par la secrétaire d'Etat, les tensions entre Mme Rice et Jérusalem sont récurrentes. Lors d'une visite, elle a évoqué la "ségrégation" que subissent les Palestiniens. Puis, la décision israélienne de décréter Gaza "entité ennemie" sans consultation l'a irritée. Le 11 septembre, le département d'Etat a demandé à Israël des "éclaircissements" sur de récentes confiscations de terres palestiniennes : un geste d'autant plus remarqué que ces confiscations fréquentes sont très rarement critiquées par Washington.

Les difficultés existent aussi du côté des Palestiniens. Ceux-ci exigent que la conférence soit le prélude à des négociations sur le "statut final" d'un Etat palestinien. Entre le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui demande "la fin de l'occupation" israélienne et le premier ministre israélien, Ehoud Olmert, qui n'envisage pas d'accord final "avant vingt ou trente ans" (le 23 septembre), l'ambition de Mme Rice - un succès diplomatique américain avant la fin de l'administration Bush - semble une gageure.

D'autant qu'elle se heurte à de fortes réticences au sein de cette administration. L'offensive "anti-Condi" est menée par le vice-président, Dick Cheney, et l'adjoint du conseiller de la Maison Blanche pour la sécurité nationale, Elliott Abrams. Elle est relayée par John Bolton, ancien ambassadeur à l'ONU, et par des chroniqueurs "ultras" sur l'Iran, la Syrie et la Palestine, tel Bret Stephens du Wall Street Journal, ex-rédacteur en chef du Jerusalem Post.

La "tendance Cheney" apparaît aujourd'hui la plus favorable à une intervention américaine en Iran avant la fin du mandat de George Bush. Pour elle, promouvoir le dossier palestinien est au mieux une illusion et plus sûrement un danger, si cela se traduit par une ouverture vis-à-vis de la Syrie, alliée à l'Iran.

Avant son déplacement, un affrontement sévère a opposé Mme Rice au vice-président au sujet du bombardement par l'aviation israélienne, le 6 septembre, d'un site syrien. Les Israéliens disent avoir auparavant présenté aux Américains des données "spectaculaires". Le site syrien aurait abrité du matériau nucléaire livré par la Corée du Nord à Damas. M. Cheney a jugé ces informations fiables ; Mme Rice les a trouvées peu convaincantes. Elle aurait bénéficié, sur ce point, du soutien de Robert Gates, le secrétaire à la défense.

Or M. Abbas et le roi Abdallah d'Arabie ont fait savoir aux Américains qu'ils doivent inviter Damas à la conférence sur le Proche-Orient. Quitte à ce que les Syriens déclinent l'invitation si la fin de l'occupation par Israël du plateau du Golan ne figure pas à l'ordre du jour.

Malgré ces difficultés, Robert Malley, ancien conseiller du président Bill Clinton, est plutôt confiant, pour une raison paradoxale : les trois protagonistes sont politiquement affaiblis. "Une conférence internationale ne créera pas instantanément l'Etat palestinien, estime-t-il. Mais si Bush peut dire : "Pour la première fois depuis Oslo (1993), nous avons un accord" ; si Abbas peut dire : "Pour la première fois, nous avons une vraie perspective sous égide internationale", et si Olmert peut dire : "Nous avons enfin un partenaire pour sortir de la violence", tous trois pourrons crier au succès et tous en ont besoin."

Sylvain Cypel

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