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      lemondefr_pet.gif  Article paru dans l'édition du 31 octobre 2008

A Gaza, une conférence de "psy" sur le blocus... bloquée

RAMALLAH ENVOYÉ SPÉCIAL


C
'est une variante à la mode gazawie du sketch de l'arroseur arrosé. Une histoire absurde comme il en survient tous les jours dans ce territoire que l'Etat d'Israël a mis en quarantaine depuis que le Hamas y a pris le pouvoir en juin 2007.

Lundi 27 et mardi 28 octobre, une conférence internationale s'est tenue à Gaza ville pour discuter des effets du blocus israélien sur la santé mentale des habitants, à l'initiative du Gaza Community Mental Health Programme (GCMHP), une ONG spécialisée dans la prévention et le traitement des troubles mentaux. Une centaine de psychologues, psychiatres et universitaires étrangers étaient invités aux débats organisés avec le soutien de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Or, plus de 80 participants venus des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de Suède ou des Pays-Bas, n'ont pu se rendre à Gaza. Comme l'arroseur piégé par son arrosoir, ces éminents spécialistes des situations de sièges ont été victimes... du siège israélien.

Empêchés de traverser le terminal d'Erez, qui commande l'entrée dans la bande côtière palestinienne, ils se sont repliés sur Ramallah, où ils ont suivi la conférence par vidéo interposée. "Ces gens n'ont pas coordonné leur venue en avance, affirme Ygal Palmor, porte-parole du ministère des affaires étrangères israélien. Les Palestiniens doivent comprendre qu'élire un mouvement comme le Hamas, qui est en état permanent de conflit avec Israël, a un prix. D'ailleurs, cette conférence a été récupérée par le Hamas."

La version de Tony Laurance, représentant de l'OMS dans les territoires occupés, est rigoureusement contraire. "Il s'agit d'une conférence scientifique à laquelle le Hamas n'a pris part en aucune manière, dit-il. Nous avons déposé il y a trois semaines les demandes de permis, et il y a une semaine, les autorités israéliennes nous ont répondu par la négative."

ENFANTS EN SITUATION DE SIÈGE

Malgré leur déception, la plupart des intervenants ont maintenu leur voyage, à l'image d'Elsa First, professeur de psychologie à l'université de New York. "J'ai travaillé six mois sur le thème de l'écoute des enfants en situation de siège. J'en ai même interviewé certains par téléphone, dans l'attente du voyage. Et un jour, un général à Tel Aviv décide, d'un trait de stylo, que tout ce travail ne compte pour rien. Quel chutzpah (culot en hébreu) !"

A Gaza, le docteur Eyad Sarraj, directeur du GCMHP et modéré notoire, fulmine : "Israël punit le peuple, pas le Hamas. Un jour, cela se retournera contre lui." Un mauvais sketch qui pourrait s'appeler l'assiégeur assiégé...

Benjamin Barthe

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