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lemondefr_pet.gif     Article paru dans l'édition du 07 novembre 2008

ETATS-UNIS En campagne, le candidat démocrate a exprimé des positions parfois floues ou changeantes

La diplomatie de M. Obama suscite de fortes attentes

Les intentions américaines au Proche-Orient restent floues

Comme Israël, les dirigeants arabes auraient sans doute préféré voir élire John McCain,
parce qu'il incarnait une certaine continuité

Si l'élection de Barack Obama ravive auprès des opinions arabes, après les deux mandats d'un George Bush particulièrement décrié, la fascination pour la démocratie américaine, qui garantit l'accession à la Maison Blanche d'un jeune candidat noir en partie d'origine musulmane, cette élection plonge les dirigeants arabes, qui appréhendent l'inconnu, dans la perplexité, en particulier les monarchies pétrolières du Golfe. Le candidat républicain, John McCain, avait ceci de rassurant qu'il représentait à leurs yeux une certaine continuité de la politique régionale de l'administration américaine à laquelle, après une période de tensions, ils avaient fini par s'adapter, tout en déplorant ce qu'ils considéraient comme ses lacunes et ses insuffisances.

Pour eux, les intentions du nouveau président concernant la situation en Irak, le programme nucléaire iranien ou encore le conflit israélo-arabe sont pour le moins floues. Ces dirigeants tiennent certes l'administration sortante pour responsable du « chaos » qui prévaut en Irak. Ils n'en sont pas moins convaincus de la nécessité absolue d'une présence militaire américaine relativement durable dans ce pays, pour en assurer la stabilité et empêcher qu'il ne vole en éclats ou ne tombe dans l'orbite de son puissant voisin iranien. D'où leur inquiétude quant au projet du président élu américain de retirer le plus rapidement possible les forces américaines de ce pays.

Leur hostilité et leurs craintes quant à l'acquisition éventuelle par l'Iran de l'arme nucléaire n'ont d'égal que leur refus d'une intervention militaire contre ce pays pour y parvenir. A maintes reprises, ils l'ont signifié au président George Bush et à ses collaborateurs, en prônant une solution par la voie diplomatique. Ils craignent néanmoins que la diplomatie vire au laxisme, en filigrane de la volonté prêtée à M. Obama d'engager un « dialogue inconditionnel » avec Téhéran. Cette inquiétude est partagée par les autorités israéliennes.

INCERTITUDES RENFORCÉES

Les incertitudes à propos du conflit israélo-palestinien sont enfin renforcées par les prochaines élections anticipées israéliennes. Il faudra attendre le 10 février 2009, puis la formation d'un nouveau gouvernement, pour que Barack Obama puisse traiter avec de nouveaux dirigeants israéliens. De plus, le mandat de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne et chef du Fatah, vient théoriquement à échéance le 9 janvier et, même s'il a l'intention de le prolonger d'un an, sa légitimité sera contestée par les islamistes du Hamas qui ont pris le pouvoir dans la bande de Gaza.

D'ici là, les frères ennemis palestiniens vont engager, à partir du 10 novembre, au Caire, un dialogue qui pourrait durer plusieurs semaines. Si un accord est finalement conclu et s'il débouche sur un gouvernement d'union nationale, la donne sera changée. Reste à savoir si, dans le même temps, le cessez-le-feu en vigueur depuis le 19 juin entre le Hamas et l'armée israélienne à Gaza perdurera. Il a subi un sérieux accroc, mercredi 5 novembre, à la suite de la découverte d'un tunnel creusé en direction d'Israël pour, selon Tsahal, capturer des soldats. Six membres des brigades Ezzedine Al-Qassam ont été tués et une cinquantaine de roquettes et d'obus de mortiers ont été tirés en direction d'Israël sans faire ni victime ni dégât.

Dans l'attente de la prise de fonctions de Barack Obama, Condoleezza Rice, secrétaire d'Etat américaine, va entreprendre, jeudi 6 novembre, un ultime voyage dans la région pour tenter de faire avancer le processus de paix, relancé le 27 novembre 2007 à Annapolis (Maryland) par le président George Bush. Cette visite culminera lors d'un sommet avec le « Quartet » (Etats-Unis, Union européenne, Russie, Nations unies), à Charm El-Cheikh (Egypte), les 8 et 9 novembre.

Mme Rice souhaite coucher sur le papier les grands principes de la négociation sur lesquels se sont accordés les deux camps sans toutefois progresser véritablement dans l'ébauche d'un accord. Il s'agirait en quelque sorte d'un remake des « paramètres » laissés par le président Bill Clinton après l'échec de Camp David, en juillet 2000, qui, cette fois, porterait le nom de George Bush. Les Palestiniens sont cependant très réticents, échaudés par le peu de cas qui a été fait de tous les accords signés auparavant.

Michel Bôle-Richard et Mouna Naïm

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