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Liberté hebdo   27 novembre au 3 décembre 2009

On n’oublie pas...

Justice pour Jean-Claude Willem :

le combat continue

Injustement condamné pour avoir boycotté les jus de fruits israéliens en réaction aux massacres de Jénine, l’ancien maire de Seclin en appelle à la Cour européenne des droits de l’Homme.

Jean Claude Willem a toujours la colombe de la paix de Picasso au revers de la veste. Ce symbole ne le quitte jamais. « C’est la médaille que je préfère » sourit-il. L’ancien maire de Seclin et journaliste à la retraite n’a pas oublié, qu’en 2008, le préfet Canepa avait refusé de lui remettre la médaille réservée à chaque édile après trente années de mandat. Motif ? Le représentant de l’État, fidèle sarkozyste dont il a été membre du cabinet à l’Intérieur, refusait que puisse être accordée une reconnaissance de la République à un élu qui a été condamné par la justice pour avoir osé dénoncer les multiples violations aux droits de l’Homme commis par l’État israélien.

« Il a fait l’objet d’une véritable vengeance du pouvoir » affirme ainsi Annick Battalan, de la Ligue des droits de l’Homme du Nord. L’affaire remonte à 2002, et aujourd’hui encore, Jean- Claude Willem doit batailler sur les plans juridique et politique pour que justice lui soit faite. Une décision de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a affirmé cet été que la condamnation dont il avait l’objet pour avoir appelé à boycotter les jus de fruits israéliens ne portait pas atteinte à la liberté d’expression. Soutenu par de nombreux mouvements, forces politiques, associations, personnalités, il veut porter l’affaire devant l’assemblée plénière de la CEDH. « L’enjeu est politique. Il s’agit de savoir si l’on peut contester la politique du pouvoir israélien. Il y a une faillite dans l’application du droit international envers Israël, qui bénéficie d’une impunité persistante. C’est pour cela que l’intervention de la société civile est nécessaire, pour assurer un relais citoyen. Ce qu’a fait Jean-Claude Willem. On lui reproche d’avoir usé de sa liberté d’expression » dénonce Jean-François Larosière, président de l’Association France Palestine solidarité (AFPS) Nord-Pas-de-Calais.

En 2002, pour protester contre les massacres de Jénine, perpétrés par l’armée israélienne contre les populations civiles, Jean-Claude Willem annonce que les cantines de la ville dont il est le maire ne serviront plus de jus de fruits en provenance d’Israël. Ce produit n’est pas anodin. Les fruits en question proviennent pour la majeure partie de territoires occupés, notamment la vallée du Jourdain. En effectuant ce choix courageux, le maire de Seclin ne se doute peut-être pas qu’il va faire l’objet d’un acharnement rassemblant supporters du Premier ministre israélien de l’époque, Ariel Sharon, le maître d’oeuvre des massacres de Sabra et Chatila, et représentants du pouvoir français.

« Entourloupe juridique »

Le représentant de l’association cultuelle israélite de Lille, Jean-Claude Komar porte plainte pour incitation à la haine raciale. En première instance, le tribunal de Lille blanchit Jean- Claude Willem. L’affaire aurait pu en rester là. Mais, de manière aussi surprenante que scandaleuse, le ministre de la Justice, Dominique Perben fait appel, sous la pression, affirme-t-on chez les soutiens du maire de Seclin, des partisans français des faucons israéliens. En appel, « une entourloupe juridique » pour reprendre l’expression d’A. Battalan, permet de condamner Jean- Claude Willem pour entrave à la liberté du commerce pouvant inciter à la haine raciale… Un jugement tordu qui sera confirmé en cassation et sur lequel la CEDH devra donc se prononcer.

« Jean-Claude Willem a eu le tort d’avoir raison avant les autres » estime Jean-Claude Lefort, député honoraire et président national de l’AFPS. « Il existe un accord entre l’Union européenne et Israël qui prévoit que cet accord doit être suspendu en cas de violation des droits de l’Homme. Or, à Jénine, il y a eu une violation flagrante des droits de l’Homme. Soutenir Jean- Claude Willem, c’est défendre la paix. Car si l’on ne met pas un terme à l’impunité dont bénéficie Israël, il n’y aura pas de paix dans cette partie du monde » continue le militant. Un comité de soutien à Jean-Claude Willem va prochainement se mettre en place, tandis que les associations appellent à une souscription pour financer les frais de justice, ceux-ci risquant en effet d’être particulièrement importants.

 Bruno CADEZ

Jean-Claude Willem, au centre, en compagnie de ses soutiens.

Jean-Claude Willem, au centre, en compagnie de ses soutiens

 

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