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http://medias.lemonde.fr/mmpub/img/lgo/lemondefr_pet.gif    Article paru dans l'édition du 02 janvier 2010

Bataille juridique autour de l'usage d'une route en Cisjordanie

Jérusalem Correspondant

Le quotidien Yedioth Aharonoth de jeudi 31 décembre a fait état de la colère du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, contre la décision rendue par la Cour suprême d'Israël en autorisant de nouveau les Palestiniens à emprunter la "route 443", qui relie Jérusalem à Tel-Aviv.

En octobre 2002, au plus fort de la seconde Intifada, le gouvernement leur en avait interdit l'usage à la suite de tirs contre des véhicules circulant sur la voie, qui avaient coûté la vie à six Israéliens.

M. Nétanyahou aurait fait part de son incrédulité devant un arrêt risquant, selon lui, de mettre en danger la vie de ses concitoyens, et promis d'étudier la possibilité de corriger l'arrêt de la haute juridiction par une législation appropriée. Cette approche est celle des partis de droite et de l'armée, qui n'ont pas de mots assez durs pour qualifier une décision obtenue par deux voix contre une.

La Cour suprême a accordé un délai de cinq mois au ministère de la défense pour faire appliquer cet arrêt sur une portion de 14 kilomètres située entre le check-point de Makkabim (près de la ville de Modi'in) et la ville de Givat Ze'ev, au nord-ouest de Jérusalem.

L'armée devra également prendre des mesures permettant d'assurer la sécurité des quelque 40 000 automobilistes israéliens qui empruntent quotidiennement la route 443, un axe qui permet d'éviter la route "numéro 1", souvent très encombrée, reliant Jérusalem à Tel-Aviv.

S'il faut s'attendre à des manoeuvres dilatoires de la part du gouvernement, les Palestiniens ont néanmoins remporté une indiscutable victoire politique, en obtenant un jugement favorable à propos de cette route partiellement construite sur des terres dont les propriétaires palestiniens ont été expropriés dans les années 1980.

DÉMARCHES SIMILAIRES

A l'époque, l'Etat avait justifié cette mesure en expliquant que la route 443 bénéficierait aussi à la "population locale" palestinienne. Depuis 2002 cependant, les quelque 55 000 Palestiniens habitant les villages situés de part et d'autre de la route se sont vu refuser le droit d'utiliser cet axe routier, et toutes les voies d'accès ont été bloquées.

Les maires d'une demi-douzaine de villages, ainsi que l'Association pour les droits civiques en Israël, avaient entamé une procédure devant la Cour suprême, laquelle a émis dans le passé des jugements tantôt favorables, tantôt hostiles, aux Palestiniens : parmi les premiers figurent plusieurs modifications de la "barrière de sécurité" (le "mur") qui trace son sillon en Cisjordanie.

Les juges ont estimé que "la liberté de mouvement est un droit fondamental", et que des dispositions qui "interdisent complètement le trafic palestinien sur la route ne sont pas conformes avec les règles du droit international".

Inquiet de ce qu'il considère comme un dangereux précédent, le ministère de la défense fourbit sa défense juridique en prévision d'une multiplication de démarches similaires : il reste plus de 60 kilomètres de routes réservées aux seuls Israéliens en Cisjordanie.

 

Laurent Zecchini

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