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LeMonde.fr  Article paru dans l'édition du 20 mars 2011

Israël s'oppose au rapprochement
du Hamas et du Fatah

Pressés par l’opinion, les deux mouvements palestiniens évoquent une réconciliation

Jérusalem
Correspondant

Ce n'est pas seulement l'environnement géopolitique d'Israël, avec les révoltes arabes, qui évolue rapidement : sur le plan intérieur, les dirigeants israéliens sont confrontés à une incertitude nouvelle. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a réagi négativement, vendredi 18 mars, à l'annonce d'un rapprochement soudain entre le Fatah, principal parti de l'Autorité palestinienne, et le Hamas, au pouvoir à Gaza. Un gouvernement réunissant les deux formations, a-t-il insisté, jeudi, dans un entretien avec la chaîne CNN, tuerait définitivement le processus de paix israélo-palestinien.

La raison ? L'Etat juif ne négociera pas avec un gouvernement comprenant des ministres du Hamas. "Pouvez-vous imaginer un accord de paix avec Al-Qaida ? Evidemment non. Le Hamas a une Constitution qui appelle à l'anéantissement d'Israël et au développement de l'islam radical à travers la région. (...) S'ils arrêtent de lancer des roquettes, s'ils arrêtent les actes terroristes et cessent d'appeler à notre éradication, nous serons heureux de parler avec eux", a-t-il poursuivi.

Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne, a répondu très vite positivement à l'invitation d'Ismaïl Haniyeh, premier ministre du Hamas, à se rendre à Gaza : "Je suis prêt à y aller demain pour mettre fin à la division", a-t-il assuré, tout en précisant qu'il envisageait cette visite non pour relancer le dialogue politique avec le Mouvement de la résistance islamique - qui a pris le contrôle de la bande de Gaza en 2007 -, mais pour former un gouvernement d'unité chargé d'organiser des élections générales.

Les deux formations palestiniennes ont tenté pendant près de deux ans de se réconcilier sous l'égide des autorités égyptiennes, qui soutenaient le Fatah tout en collaborant avec Israël pour maintenir le blocus de Gaza. Un cadre peu favorable, d'autant que le Hamas conteste la légitimité de M. Abbas, resté en fonctions alors que son mandat s'est achevé en 2009. Débarrassées de la tutelle de l'ex-président Hosni Moubarak, confrontées au vent des révoltes arabes qui pourrait s'étendre à la Palestine, les deux formations sont soumises à la surenchère de la "rue palestinienne".

Mahmoud Abbas en échec

Officiellement, les slogans des rassemblements populaires organisés en Cisjordanie et à Gaza appellent à la réunification du mouvement palestinien. Potentiellement, ils peuvent déstabiliser un leadership politique dont la popularité, tant à Gaza qu'à Ramallah, est ébranlée. Mahmoud Abbas a des raisons de faire un pas en faveur de l'unité : sa stratégie de négociations avec Israël a abouti à une impasse, et sa stratégie de substitution consistant à faire reconnaître un Etat palestinien aux Nations unies n'est pas viable si la désunion politique et territoriale palestinienne perdure.

Mais l'unité n'est pas exempte d'incertitudes : le soutien (notamment financier) à la cause palestinienne par les Etats-Unis et l'Union européenne - qui maintiennent le Hamas sur leur liste des organisations terroristes - risque de faiblir face à un gouvernement palestinien réunifié.

C'est pour convaincre les uns et les autres de continuer à proscrire le Hamas et à faire retomber l'échec du processus de paix sur l'Autorité palestinienne que les autorités israéliennes ont mis en exergue deux événements récents : l'arraisonnement du cargo Victoria, transportant des armes d'origine iranienne à destination, disent-elles, de Gaza, et le massacre d'une famille de la colonie juive d'Itamar, attribué à des "terroristes palestiniens".

Laurent Zecchini

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