
L'Union européenne va approuver une importante accélération de
la coopération avec Israël
Par Laurent Zecchini (Jérusalem, correspondant)
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2012/07/23/l-union-europeenne-va-approuver-une-importante-acceleration-de-la-cooperation-avec-israel_1736874_3218.html
Quel
rapport peut-il y avoir entre le 11e Conseil d'association Union européenne-Israël, qui se
réunit à Bruxelles, mardi 24 juillet, et l'attentat-suicide
anti-israélien qui s'est produit en Bulgarie le 18 juillet ? A priori
aucun, mais les autorités israéliennes se sont cependant évertuées ces
derniers jours à enjoindre les Européens à les soutenir au moment où l'Etat juif est frappé
par le terrorisme... Comment ? En ne revenant pas sur leurs engagements de renforcer de façon significative les domaines de la
coopération bilatérale, lesquels ont été pris le 2 mai, lors d'une réunion
conjointe à Jérusalem.
En principe leur inquiétude n'est pas
fondée : le Conseil d'association, qui se tiendra en marge du Conseil des
ministres des affaires
étrangères, va entériner une liste de 60 nouvelles "activités
concrètes dans plus de quinze domaines différents", y compris des
liens avec plusieurs agences européennes. Officiellement et juridiquement,
cet important renforcement de la coopération avec Israël ne constitue pas ce
fameux "rehaussement" des relations demandé depuis
longtemps par l'Etat juif, mais une simple déclinaison des "opportunités"
prévues par le Plan d'action entre l'UE et Israël, adopté en 2005.
IMPASSE DU PROCESSUS DE PAIX
En réalité, au-delà des mécanismes
communautaires se dessine l'intention d'accroître la coopération politique et technique avec
Israël, en dépit de l'absence totale de progrès du processus de paix avec les
Palestiniens, interrompu depuis septembre 2010. Les Vingt-Sept vont insister dans leurs conclusions sur la nécessité de mettre en œuvre "activement et rapidement"
ce catalogue de mesures, et rappeler qu'ils sont prêts à envisager un rehaussement des relations bilatérales
lorsque les conditions seront réunies.
Cette démarche très politique avait
été gelée après l'intervention militaire israélienne dans la bande de Gaza au
cours de l'hiver 2008-2009. Le paradoxe est que les ministres européens des
affaires étrangères vont souligner dans le même communiqué qu'il est impératif de maintenir la solution de deux Etats (l'un Israélien,
l'autre palestinien), dénoncer l'accélération de la colonisation en
Cisjordanie, les expulsions de familles palestiniennes, la démolition de
maisons et d'infrastructures à Jérusalem-Est, l'aggravation des conditions de
vie de la population
palestinienne, et les graves limitations imposées à l'Autorité palestinienne
pour favoriser le développement économique des territoires
occupés, en particulier dans la zone C (sous contrôle total d'Israël).
La décision des Vingt-Sept est
particulièrement significative, dans la mesure où elle intervient après les
conclusions adoptées par les ministres européens des affaires étrangères, le
14 mai, qui avaient représentées un net durcissement de la position
européenne : l'UE avait alors exprimé sa "profonde préoccupation
devant les développements sur le terrain, qui menacent de rendre la solution à deux Etats impossible". Ce
passage est repris dans le communiqué du 24 juillet, lequel renvoie à une
annexe qui dresse la liste des 60 dispositions ayant fait l'objet d'un
accord.
49 SECTEURS DE COOPÉRATION
Parmi les 49 secteurs de coopération
énumérés, figurent notamment ceux-ci : douanes, marché intérieur,
agriculture, mouvement des personnes et sécurité sociale, coopération
statistique, tourisme, justice
et affaires intérieures, transport (implication du secteur privé, chemin de
fer, sécurité routière,
etc.), énergie, société de l'information (communications électroniques,
Internet et cyber- sécurité), environnement, science et technologie, santé
publique, etc.
L'Union européenne et Israël vont,
d'autre part, coopérer sur des "questions horizontales",
c'est-à-dire engager une coopération via différentes agences et entités
communautaires : l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies,
Eurojust (Unité de coopération judiciaire), Europol (Office européen de
police), le Collège européen de police,
l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA), l'Agence européenne pour
la sécurité maritime (EMSA), l'Agence européenne pour l'environnement (AEE),
l'Agence spatiale européenne (ESA), le Centre européen de prévention et de
contrôle des maladies (ECDC).
S'agissant de ces nouvelles avancées,
les Vingt-Sept soulignent à plusieurs reprises qu'elles "suivent la
structure du Plan d'action" UE-Israël. Un diplomate européen à
Bruxelles très au fait de ce dossier, insiste sur ce point : "Il ne
s'agit que de l'approfondissement de la mise en œuvre du Plan d'action
actuel. Politiquement, il y avait un accord, depuis l'année dernière, pour effectuer un travail technique et commencer à réfléchir à d'autres secteurs de
coopération, mais ce n'est en aucun cas un rehaussement des relations
bilatérales."
Dont acte. Il serait cependant douteux
que l'Autorité palestinienne, déjà fortement déçue de la pusillanimité
européenne face à l'Etat juif, ait une lecture aussi bénigne de ce
renforcement de l'association entre Israël et l'UE.
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