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http://medias.lemonde.fr/mmpub/img/lgo/lemonde_pet.gif    Mardi 7 octobre 2014

Éditorial  -  page 23

Israël compromet la création d'un État palestinien

Benyamin Nétanyahou passe pour être un homme politique de statu quo. Quand il s'agit de la recherche de la paix, le premier ministre israélien n'aurait qu'un programme : geler la situation en l'état, enterrer politiquement toute tentative de négociation sérieuse avec les Palestiniens. Rien n'est plus inexact.

M. Nétanyahou vient encore de prouver qu'il avait un programme, poursuivi avec assiduité : développer sans cesse plus avant les implantations israéliennes en Cisjordanie et dans la partie arabe de Jérusalem. Autrement dit, empêcher physiquement la possibilité d'un État palestinien.

La semaine dernière, le gouvernement de droite que dirige "Bibi" Nétanyahou a donné son accord à la construction de 2 610 unités de logement dans une partie très disputée de Jérusalem-Est. Cette nouvelle implantation rendra très difficile, sinon impossible, d'aller vers un règlement de paix fondé sur la solution dite "des deux États" : un État palestinien aux côtés d'Israël.

L'ensemble prévu va séparer les Palestiniens de Jérusalem du reste de la Cisjordanie, brisant la continuité entre la Ville sainte et le territoire qui pourrait accueillir l'essentiel d'un État palestinien.

L'annonce de ce programme immobilier est intervenue mercredi 1er octobre, le jour même où M. Nétanyahou, de retour de l'Assemblée générale de l'ONU, à New York, était reçu à Washington par le président Barack Obama. Il n'est rien sorti de cet entretien, sinon un communiqué rageur de la Maison Blanche dénonçant la dernière décision du gouvernement israélien. Celle-ci " empoisonne l'atmosphère et conduit à s'interroger sur la sincérité de l'engagement d'Israël à arriver à un règlement négocié, pacifique, avec les Palestiniens  ", a dit la présidence américaine.

La Maison Blanche aura rarement condamné aussi clairement la politique du gouvernement Nétanyahou. Elle avait implicitement déjà reconnu que la colonisation continue était à l'origine de la rupture, en avril, de la médiation entre Israéliens et Palestiniens à laquelle le secrétaire d'État, John Kerry, s'est efforcé durant neuf mois.

Deux jours plus tôt, à l'ONU, le premier ministre avait assimilé le Hamas au groupe djihadiste dit "État islamique" – une manière d'exclure à l'avance toute possibilité de négociation entre Israël et un gouvernement palestinien d'unité représentant à la fois le Fatah et le Hamas. Il avait aussi fait part de toute sa méfiance à l'égard des négociations nucléaires en cours avec l'Iran – qualifié d'un des pays les plus dangereux du monde.

Sans doute était-ce là sa manière de répondre à M. Obama qui, quelques jours plus tôt à la même tribune, avait fait cette remarque attristée : " La violence qui submerge aujourd'hui la région - le Moyen-Orient - conduit trop d'Israéliens à abandonner le difficile chemin de la paix - avec les Palestiniens - . Ce devrait être un sujet de réflexion en Israël"

Benyamin Nétanyahou est assuré d'un soutien sans faille au Congrès américain, notamment du côté des républicains. Ceux-là s'apprêtent à élargir encore leur majorité à la Chambre des représentants et peut-être à gagner le Sénat lors du scrutin législatif de mi-mandat, le 4 novembre. Le premier ministre profite de la faiblesse de Barack Obama.

Pour paraphraser ce dernier, cela devrait être un sujet de réflexion à la Maison Blanche.

© Le Monde

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