AFPS Nord Pas-de-Calais CSPP

   



L'ennemi commun : le fanatisme religieux
par Mona Eltahawy
(1)

 

Washington Post, 27 août 2005

Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant

Les soldats juifs qui traînaient les colons de Gaza nous ont rappelé combien les Israéliens et les Palestiniens ont besoin les uns des autres. Sans "l'ennemi", Israéliens et Palestiniens se diviseraient d'après des fronts qui affleurent à la surface malgré l'unité qu'ils revendiquent pour s'affronter. Et le front le plus important, c'est le fossé entre laïques et religieux qui existe dans les deux sociétés.

En 1998, quand j'habitais Jérusalem, beaucoup de mes amis israéliens manifestaient clairement leur opposition aux colons. Ils ne les comprenaient pas, à commencer par leur zèle religieux. "Nombreux en Israël sont ceux qui espèrent maintenant que nous entamerons un processus qui nous mènera vers une certaine normalité", me disait l'un d'eux la semaine dernière. "Je veux dire que, jusqu'à maintenant, les colons nous ont imposé leur ordre du jour, et qu'il y avait deux types de règles : l'un pour les gens ordinaires, l'autre pour eux. Nous espérons que les priorités vont changer".

Dans la société israélienne, la confrontation entre laïques et religieux ne se manifeste pas toujours sous des formes aussi spectaculaires que ce que, nous ont montré ces scènes à Gaza, mais elle est présente. Le quartier ultra-orthodoxe de Mea Shearim, à Jérusalem, est souvent la scène d'affrontements entre les habitants, qui observent le shabbat, et des Juifs laïques dont les voitures  sont agressées par des jets de pierres parce qu'ils roulent le shabbat. Les mêmes habitants de Mea Shearim s'en prennent aussi parfois à des femmes quand ils considèrent que leur tenue n'est pas assez décente.

Partout, les fondamentalistes religieux se ressemblent. Dans le conflit israélo-palestinien, fondamentalistes juifs et musulmans se renvoient leur image en miroir.

Ce qui me mène à poser la question que chacun, au sein de la société palestinienne, devrait se poser, maintenant qu'Israël en a terminé avec son retrait de Gaza : quand le moment sera venu, l'Autorité palestinienne affrontera-t-elle ses fondamentalistes comme Israël a affronté ses fanatiques religieux dans les colonies? Quand l'intérêt national des Palestiniens sera en jeu, l'Autorité palestinienne voudra-t-elle soumettre le Hamas?

Le Hamas veut dépeindre le retrait unilatéral israélien de Gaza comme une victoire pour sa campagne de violences et de terrorisme. Or, une pareille victoire pour le Hamas serait une défaite pour le peuple palestinien. Celui-ci a été pris entre la brutalité de l'occupation israélienne et les massacres commis par le Hamas, qui n'ont rien apporté sinon davantage de violences israéliennes contre les Palestiniens.

La deuxième intifada, "dynamisée et inspirée par la tactique du Hamas", a été un échec et un désastre pour les Palestiniens. Au contraire de la première intifada, qui a mobilisé l'opinion publique mondiale autour des "enfants lanceurs de pierres", la deuxième a constitué un exercice en nihilisme qui a fait beaucoup plus de mal que de bien aux Palestiniens.

L'Autorité palestinienne, quand elle était dirigée par Yasser Arafat, porte elle aussi une responsabilité. La corruption et le manque de démocratie et de transparence qui y régnaient ont laissé un vide que Hamas s'est empressé de combler.

Maintenant que Gaza est libérée des soldats et des colons, c'est l'occasion pour Mahmoud Abbas de montrer aux Palestiniens jusqu'où il est prêt à aller pour affirmer son autorité. Si Abbas met en doute un seul instant qu'il soit important de soumettre le fanatisme religieux du Hamas, rappelons-lui simplement Yousra Azzami, 20 ans, tuée à bout portant par le Hamas pour "conduite immorale" quelques jours avant son mariage. Elle se trouvait dans une voiture avec sa sœur, son fiancé et son frère quand des hommes armés et masqués du Hamas forcèrent la voiture à s'arrêter dans un quartier de gaza et la tuèrent.

Quand les colons et les soldats étaient encore à Gaza, il était facile de dissimuler ces crimes. Depuis longtemps, les familles qui ont souffert du Hamas étaient réduites au silence, pour le bien de la Palestine. Les colons et les soldats partis de Gaza, le fanatisme du Hamas doit être soumis, pour le bien de la Palestine et de son peuple.

La meilleure manière de renforcer Mahmoud Abbas est de rendre la vie meilleure pour les Palestiniens. Gaza a besoin d'investissements si Abbas doit donner les logements et les emplois qu'il a promis à son peuple.

La communauté internationale peut manifester sa confiance dans le peuple palestinien en dirigeant vers lui des fonds, et l'Autorité palestinienne peut ramener cette confiance en garantissant que chaque centime ira à Gaza et à son avenir, et non à la construction de villas pour des fonctionnaires palestiniens.

Les Etats-Unis doivent pousser les Israéliens et les Palestiniens à avancer selon les principes définis par la "Feuille de route" vers un Etat palestinien à côté d'un Etat d'Israël en sécurité. Les deux belligérants de ce conflit vieux maintenant de plusieurs décennies peuvent faire davantage pour aider leurs peuples à faire advenir un avenir de paix.

Regarder vers l'avant, cela exigera de regarder aussi à l'intérieur, vers lignes de front qui affleurent à la surface. Il ne faut pas permettre aux fanatiques religieux, en Israël et en Palestine, de se mettre en travers de la route vers la paix.

(1) Mona Eltahawy est éditorialiste, entre autres pour le quotidien londonien en langue arabe Asharq al-Awsat. Son site web :
http://www.monaeltahawy.com/new/index.aspx


Diffusé par Common Ground News Service
http://www.commongroundnews.org


Source : La Paix Maintenant


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