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L'eau et le mur

Rare dans tout le Proche-Orient, l’eau est un enjeu majeur de la colonisation israélienne en Palestine, notamment en Cisjordanie. Contrôler et confisquer les réserves en eau a toujours été la politique systématique des gouvernements israéliens qui se sont succédé.

Une nappe phréatique très importante, le bassin aquifère occidental, s’étend sous les 3 gouvernorats du Nord : 80% des puits sont dans celui de Tulkarem. Avec le Jourdain, la nappe phréatique occidentale est la plus grande ressource en eau de la Palestine historique. Dès le début des années 30, l ’importance de l ’eau s ’est révélée vitale. Les lieux d’implantation des colonies juives avant 48 en témoignent. Avec l’établissement de l’Etat d’Israël, les projets à l’échelle nationale incluaient le détournement des sources autour du Lac de Tibériade et l’appropriation de la nappe phréatique occidentale. Après 67, l’occupation a permis à Israël d’en avoir le contrôle. En interdisant le creusement de puits en Cisjordanie, située sur la partie haute de la nappe, les autorités israéliennes favorisaient les puits creusés dans la partie basse, Israël. Il s’agit d’une stratégie bien pensée, indépendante des développements politiques. Dans toutes les négociations, y compris avec les Egyptiens en 78, les responsables israéliens de la défense, de l ’agriculture et des infrastructures, et les experts de l’eau ont eu une approche concertée. Pendant les négociations d ’Oslo, les Israéliens ont présenté une carte qui superposait les limites orientales d ’Israël à celles de la nappe y incluant de facto une partie de la Cisjordanie. Depuis Oslo la politique israélienne est la même: un seul puits palestinien a été autorisé, les puits creusés « illégalement » dans le Nord, vers Jénine ou Tulkarem, ont été démolis. Par contre ceux creusés dans le bassin oriental, la vallée du Jourdain, Jéricho, ont échappé à la destruction, prouvant a contrario l’importance qu’Israël attache au bassin occidental. Le contrôle des ressources en eau est aussi lié à la colonisation par les implantations «illégales» qui, outre qu ’elles aident au contrôle militaire du territoire palestinien, assure aussi la mainmise sur l’eau par et pour Israël. Ainsi toutes les infrastructures industrielles des colonies dans la région d’Ariel, près de Salfit, sont connectées au réseau israélien, alors qu ’elles puisent dans la nappe occidentale, dès lors contrôlée de facto par Israël. Les infrastructures ne correspondent pas au besoin des colonies actuelles -Burkan par exemple-, mais, dans une logique expansionniste, ce sont des investissements à long terme qui mettront dans 20 à 30 ans tout le bassin aquifère sous contrôle israélien. Toutes les données hydrologiques israéliennes mettent en évidence que le bassin occidental est intégré dans le cycle hydrologique israélien. Il est d’ailleurs inclus dans le budget national israélien pour l ’eau. Le Mur n ’est donc pas une surprise pour un hydraulicien, c’est la mise en place de la politique israélienne de contrôle des ressources vitales de la nappe phréatique occidentale. Pour assurer ce contrôle, le Mur crée des faits établis sur le terrain, pour appuyer les négociations à venir. L’utilisation de l’eau est liée à l’agriculture des terres fertiles en surface. Inaccessibles à cause du Mur, ces terres vont s ’assécher et se stériliser en quelques saisons ce qui fera qu ’on ne les utilisera plus. Il sera alors impossible aux Palestiniens de demander dans toute négociation l ’accès à l ’eau pour des terres « inutilisées ». Israël comme à son habitude utilisera cet argument pour délégitimer les revendications palestiniennes. Les communautés agricoles et leur mode de vie sont menacés. Les terres devront être abandonnées. Il faudra aller ailleurs en Cisjordanie chercher du travail. Cela permettra à Israël d’imposer de fait une diminution de la population et, le travail étant rare en Cisjordanie, de se procurer une force de travail palestinienne bon marché. Le Mur n ’est pas une «barrière de sécurité ». Le tracé de la première phase au nord, qui se superpose à une réalité hydrologique et non géographique, est bien la preuve qu’il fait partie de la politique d’annexion par Israël de la terre et de l’eau palestiniennes. Problème supplémentaire, l’augmentation énorme du prix de l’eau. Pour faire face à la pénurie due, non à l ’absence d’eau, mais à sa confiscation ou l’inaccessibilité des sources, les Palestiniens doivent recourir à l’achat d’eau fournie par des camions citernes, vendue par la compagnie israélienne qui en a le monopole. La rareté de l’eau, la loi du marché et surtout les difficultés considérables d’accès aux villages et hameaux pour les camions ont fait flamber le prix de l’eau : 80% depuis le début de l’Intifada !

Qalqilya

Qalqilyia est l’une des régions agricoles productrices de fruits sous laquelle repose la plus grande nappe phréatique de la région. La ville a vu déjà son accès à l ’eau quasi détruit pendant l’invasion de 1965, station d ’épuration et canalisations détruites. Le mur aujourd’hui en confisque une trentaine dans la région, privant Qalqilya de prèsde 20% de son approvisionnement en eau et les oliviers centenaires d ’irrigation. Tant pour les cultures que la consommation humaine, les puits y sont nombreux et indispensables et ... sous le contrôle militaire strict d ’Israël qui en a interdit tout nouveau creusement depuis 67. Dans la première phase le Mur en confisque ou détruit une cinquantaine de même que des citernes : 36 puits confisqués et 14 qui sont ou seront démolis, 34 dans le district de Qalqilya, 7 à Jayyouz, 14 passés entre le Mur et la Ligne Verte,etc. S ’y ajoute l’interdiction du captage dans le district de Tulkarem et la destruction des canalisations dont 35 km ont été détruits pendant la première phase de construction du Mur, sans compter l’interdiction de creuser des puits ou d’en réhabiliter. Attil, Farun, Habla, Rummana, Qafin ... 6 705 000 m 3 d ’eau par an sont ainsi confisqués. Des puits dont l’eau ne convient qu’à l ’agriculture sont maintenant utilisés pour la consommation alimentaire. Dans le même temps,9 puits viennent d ’être creusés dans le district de Qalqilyia pour les colonies israéliennes.

(1)–D ’après un article pour le Pengon d ’AbdelRahman Tamimi,directeur du PHG (Palestinian Hydrology Group), ancien négociateur palestinien à Oslo, pour les questions de l ’eau.

Source : MRAP
http://www.mrap.fr/differences/differences2005/differences254/dossier014


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