AFPS Nord Pas-de-Calais CSPP

   


 

[Que faire après le retrait de Gaza? Yossi Beilin et Yasser Abed Rabbo, de
l'Initiative de Genève, pensent comme Mahmoud Abbas qu'il faut passer très
vite à la phase des négociations sur un règlement final. Gershon Baskin
plaide, lui, pour une période d'intérim qui, pense-t-il, pourrait permettre
aux parties de panser leurs plaies et de rapprocher leurs positions]

http://www.jpost.com/servlet/Satellite?pagename=JPost/JPArticle/ShowFull&cid
=1110165541168&p=1006953079865

Jerusalem Post, 7 mars 2005

Le jour d'après le retrait de Gaza
Par Gershon Baskin (1)

Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant


En supposant que le Premier ministre Ariel Sharon réussisse à passer
l'épreuve du vote du budget la semaine prochaine, le plan de désengagement
devrait se dérouler comme prévu. Il est temps aujourd'hui de réfléchir à ce
qui s'ensuivra.

Les scénarios d'après désengagement sont à l'étude. Les options sont
nombreuses, et faire coïncider les intérêts stratégiques avec des
orientations stratégiques possibles n'est pas chose facile.

Sur le plan de la politique intérieure, il est probable que l'histoire
d'amour entre le Likoud et les travaillistes va virer à l'aigre. Le Parti
travailliste va éprouver le besoin de trouver une identité différente de
celle d'un Likoud post-désengagement. Dans la perspective de nouvelles
élections, le conflit entre Sharon et Netanyahou va s'enflammer, ce qui
pourrait conduire à une telle recomposition du paysage politique qu'il
deviendrait quasiment méconnaissable, avec l'émergence de nouvelles
coalitions et de nouvelles alliances.

 Sur le plan international, les pressions pour en revenir à la Feuille de
route vont augmenter, une fois que le désengagement sera accompli, et ces
pressions seront exercées essentiellement sur Israël. Si les Palestiniens
remplissent leurs obligations définies par la Feuille de route dans le
domaine de la sécurité et des réformes économiques et politiques, Israël se
verra requis de remplir les siennes concernant le gel de la colonisation, le
démantèlement des avant-postes et un retrait sur les positions de décembre
2000.

Le président Bush évite d'exercer une pression sur Israël jusqu'à ce que le
désengagement de Gaza soit effectif ; mais alors, la communauté
internationale, emmenée par les Etats-Unis, dira probablement que la Phase 2
de la Feuille de route devrait commencer à être mise en ¦uvre.

Cette phase 2 s'ouvre sur l'option de la création d'un Etat palestinien avec
des frontières provisoires. Aucune autre option n'est envisagée, et puisque
Bush a déclaré qu'il devait y avoir un Etat palestinien, il semble probable
qu'aucune autre option ne sera proposée.

Le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, dit que la case
phase 2 devrait être sautée pour se rendre directement à la phase 3 : des
négociations sur un statut définitif. Pour Abbas, un Etat palestinien avec
des frontières provisoires serait encore un accord intérimaire à long terme
qui provoquerait de la frustration et pourrait mener à un nouveau cycle de
violences.

Oslo nous a appris que rien n'est plus définitif qu'un accord intérimaire.
Est-il logique de passer directement à la fin du jeu? Yossi Beilin et Yasser
Abed Rabbo, de l'Initiative de Genève, soutiennent l'idée que la fin du jeu
est connue, les problèmes et les solutions clairement définis, et que les
remettre à plus tard n'aboutirait à rien.

Cela est loin d'être absurde. Mais on ne peut s'empêcher de poser la
question : sommes-nous réellement prêts ? Pouvons-nous, Israéliens et
Palestiniens, nous faire suffisamment confiance pour faire les concessions
nécessaires pour faire advenir une vraie paix après plus de quatre années de
violences sanglantes? Si nous nous engageons dans des négociations sur un
règlement définitif, pouvons-nous aboutir à un accord, ou bien va-t-on voir
une répétition de Camp David?

Avec la soi-disant ambiguïté constructive de la Feuille de route, qui laisse
tant de choses dans le flou, il est difficile de déterminer ce qu'il faut
faire. Qu'est-ce qu'un Etat aux frontières provisoires ? Quelles vont être
ces frontières? Cet Etat sera-t-il viable? Y aura-t-il continuité
territoriale?  Y a-t-il des avantages à négocier un règlement définitif
d'Etat à Etat ?

Abbas craint que la création d'un Etat palestinien aux frontières
provisoires ne fasse disparaître la question palestinienne de l'ordre du
jour de la communauté internationale, alors que de nombreux problèmes non
réglés risquent d'envenimer la situation. Israël prétend qu'avant d'aboutir
à des accords définitifs sur les frontières et sur des questions comme
Jérusalem, il faut d'abord voir comment les Palestiniens se comportent en
tant qu'Etat.

L'existence d'un Etat palestinien limitera la capacité d'Israël à envahir le
territoire palestinien. La communauté internationale a agi contre l'Irak
quand il a envahi un Koweït souverain. Bien qu'il soit probable que les
Américains utiliseraient leur droit de veto au Conseil de sécurité, Israël
n'a aucune envie d'assister à un débat sur des sanctions possibles suite à
l'invasion d'un autre Etat souverain, en particulier un Etat que la
communauté internationale soutient et à la création duquel elle travaille.

La naissance de l'Etat de Palestine provoquera un changement important dans
l'environnement politique international. Ce changement influera
indubitablement sur les relations bilatérales entre Israéliens et
Palestiniens, même si l'occupation ne sera pas complètement terminée.

Au bout du compte, il semble qu'il soit assez sage d'avoir un autre accord
provisoire avant de rechercher une solution de "fin de conflit". Il y a
assez peu de chances qu'Ariel Sharon soit capable de faire les concessions
nécessaires pour aboutir à un tel accord. De même, la direction
palestinienne a besoin de temps pour convaincre son opinion de faire des
concessions sur la question des réfugiés afin de parvenir à un accord avec
Israël.

Ainsi, il paraît sage de ne pas emballer le processus, il faut encore du
temps pour soigner quelques-unes des blessures ouvertes qui saignent encore.
Les dirigeants israéliens et palestiniens doivent se démontrer les uns aux
autres qu'ils sont capables d'avoir des relations de respect et de dignité.
Ils doivent arrêter de renforcer les extrémistes à chaque fois que ces
derniers agissent contre les intérêts des deux peuples.

Les parties ont encore du mal à résoudre le problème du transfert de
l'autorité aux Palestiniens à Jéricho et dans d'autres villes de
Cisjordanie. Il n'est pas encore évident aux yeux d'Israël que les
Palestiniens agissent réellement contre le terrorisme. Peut-on les imaginer
se confronter au problème du partage de la souveraineté sur Jérusalem?

Le temps doit jouer son rôle dans la reconstruction des relations. Mais le
temps seul ne suffit pas. Les parties ont pris des engagements, endossé des
responsabilités. Il y a la Feuille de route et le Quartette pour diriger le
processus. Tout cela doit concourir à nous permettre d'aller au-delà de ces
tout premiers pas hésitants, qui consistent à recréer un processus de paix
avant de passer à sa résolution définitive.


(1) Gershon Baskin est le co-directeur israélien du Israel/Palestine Center
for Research and Information. www.ipcri.org

(2) cf. notre article http://www.lapaixmaintenant.org/article1003


Source: La Paix Maintenant

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