AFPS Nord Pas-de-Calais CSPP

   



A l’ombre du Mur : 
pillage de terre et construction de colonies à Jayyous

Gush Shalom
 
En face de Jayyous, qui a perdu la plupart de ses terres à cause du Mur, des colonies fleurissent.

Le 31 décembre 2004, en soutien à la résistance civile des habitants des Territoires Occupés, et à l’initiative du Comité Palestino-israélien pour Jayyouz, Gush Shalom, Taayush, Icadh et des Internationaux feront entendre leur opposition aux colonies du Mur en plantant des oliviers à Jayyous, étranglé par le Mur.

En face de Jayyous, qui a perdu la plupart de ses terres à cause du Mur, des colonies fleurissent, présentées comme des extensions de celle de Zufin. La construction, qui fait partie des nouvelles colonies du Mur, marque l’étape finale du projet du mur. Le 10 décembre 300 oliviers ont été déracinés...Quand la construction sera achevée les gens de Jayyous auront perdu ce qui reste de leurs terres de l’autre côté de la « barrière ».

A l’ombre du plan de désengagement de Gaza, une nouvelle vague de colonisation se déroule en Cisjordanie. Particulièrement visible le long de la Ligne verte, elle va de Elkana et Oranit près de Kufr Kassem, en passant par Zufin, jusqu’à Reihan au nord.

Des compagnies privées, propriété des colons, et des compagnies d’état reprennent la construction des colonies et construisent des milliers de logements, dans le but de faire disparaître la Ligne verte et d’annexer les terres rendues inaccessibles par le Mur à leurs propriétaires palestiniens. Cette opération s’inscrit dans la stratégie d’annexion et de spoliation mises en œuvre par les Barrières de Séparation.

Les combats des deux dernières années ont apporté quelques victoires, même partielles : plusieurs centre de résistance populaire à l’occupation se sont formés, qui ont arrêté la progression de la Barrière dans certains endroits (Salfit/ Ariel, ou près de Budrus [1]), mais pas dans d’autres comme Jérusalem et les collines d’Hébron. Il faut noter que dans le contexte politique actuel défavorable à la construction active du Mur, le gouvernement Sharon met à profit ce temps de pause pour préparer les infrastructures afin que, dès que le vent tournera, la construction du système de Barrières se fasse en très peu de temps.

Alors que la construction du Mur lui même est au ralenti, le travail dans les colonies qui l’accompagne est en plein essor, officiellement pour étendre des colonies existantes, afin de camoufler la manœuvre. Souvent c’est en fait à des kilomètres des colonies existantes (comme à Alfei Menasheh).

On commence à voir l’étendue de ce plan : si l’extension de Alfei Menasheh vers la Ligne verte a été arrêtée par les habitants israéliens de Nirit, la colonie s’étend maintenant dans toute la zone vers le Mur entre les villages palestiniens de Ras al Tira et Ras Atiya et sur leurs terres. Au nord, on ajoute 2100 logements à la colonie de Zufin, sur des terres prises à Jayyous. 2000 logements sont prévus à Sa’lit pour créer une colonie qui continuera sans interruption jusqu’à Zur Nathazn, du côté israélien de la Ligne verte. Au nord, une extension massive de la colonie de Reihan est planifiée.

Nous sommes en fait confrontés à un processus énorme d’annexion et de colonisation dans la partie nord du système de murs, dans le but de finir de déposséder les Palestiniens de leurs terres. [...]

Ainsi, alors que le débat public en Israël se focalise sur les menaces des colons, le processus de colonisation de la Cisjordanie continue, sous les auspices du Mur et avec l’assistance des autorités d’occupation.

Cette dernière opération s’inscrit dans la stratégie à long terme de Sharon, de faire disparaître la Ligne verte et d’élargir l’accord [national] sur les colonies en se concentrant sur celles qui sont proches de la Ligne verte qui offrent « un niveau de vie élevé » et de la « sécurité personnelle ». Aussi en éliminant les Palestiniens, par l’annexion de leurs terres, et en les faisant passer pour des « dangers pour la sécurité » (par exemple , on assure la sécurité de Shaul Mofaz en détruisant l’orangeraie de Zohriya Mushaad, dont le mari est mort.).

La vague actuelle de colonisation se déroule dans des conditions politiques favorables. Le flou, la confusion qui entourent le plan de désengagement permettent à Sharon de mettre en place les composants du projet en Cisjordanie -le renforcement des colonies.

En Israël la constitution d’un gouvernement d’unité offre un cadre politique adéquat pour centrer les efforts d’annexion sur les zones qui faisaient de toutes façons partie du plan d ‘annexion de la ligne Sharon/ Barak. Pendant ce temps, dans les Territoires Occupés les autorités d’occupation ont passé les derniers mois à essayer d’imposer une normalisation, afin de prouver que les Palestiniens s’accommodent à la vie à l’ombre du Mur.

Le Mur permet aux entrepreneurs qui construisent les colonies d’assurer leurs intérêts financiers. Pour ceux qui veulent coloniser en sécurité, il garantit une séparation effective de la population locale dépossédée de sa terre, et un développement et une annexion rapides.

C’est pour ces raisons là qu’il est de notre devoir de prendre part à la tentative d’arrêt de ce processus et d’attirer l’attention sur sa signification politique et la destruction qu’il entraîne : en plus des 5 hectares sur lesquels s’érige le Mur, 72% des terres de Jayyous ont été confisquées (86 ha). Il faut des permis pour accéder aux champs de l’autre côté du Mur [2]et peu d’habitants de Jayyous en ont obtenu. La production du village (agrumes, olives etc.) a été détruite, 6 puits ont été rendus inaccessibles, en conséquence 15000 citronniers sont morts de sécheresse. L’assèchement et la stérilisation des terres fertiles permet de les faire tomber dans le domaine public [3]. Cela fait partie du processus de colonisation.

La construction de nouvelles colonies, que ce soit les avant-postes au nord et à l’est de Zufin, une zone industrielle au pied du Mur ou une nouvelle route pour relier les colonies, complètera le processus de dépossession. La majeure partie des terres qui resteront aux habitants de Jayyous se trouvera à l’ouest des colonies qu’il leur faudra traverser afin de les atteindre. Selon la tradition, ils seront déclarés « risques pour la sécurité », et ne seront pas autorisés à traverser la route et les colonies pour aller à leurs champs.

La construction de la Barrière fait partie procédé connu de colonisation : on achète la terre à des collaborateurs, on déclare la terre palestinienne « propriété de l’état », on rompt la contiguïté territoriale des communautés, on perturbe la trame de la vie économique et sociale, on assèche les terres agricoles et on transforme les fermiers en « risques pour la sécurité » dans leurs propres champs.

Les gens de Jayyous ont tenu dans leur combat contre la construction des Barrières de Séparation . Nous devons nous tenir auprès d’eux dans ce combat. Le temps est venu de se lever contre les colonies du Mur.

[1] Salfit est une ville palestinienne rurale au sud ouest de Naplouse. Ariel est la plus grande colonie d’implantation juive de Cisjordanie, près de Salfit. Ses quelque 15000 colons ne seront pas évacués. Budrus, village agricole entre Ramallah et Jérusalem est depuis des mois le lieu de manifestations contre le Mur qui a déjà volé l’essentiel des terres du village. La répression israélienne y a fait des morts et de nombreux blessés.
[2] si pour une raison quelconque les autorités militaires qui octroient les permis considèrent qu’un membre -même très éloigné- d’une famille est suspect, personne n’aura de permis.
[3] Une vielle loi ottomane, conservée sous l’occupation britannique puis israélienne, stipule qu’une terre en jachère ou non cultivée pendant 3 ans tombe dans le domaine public, c’est à dire l’état israélien.

Gush Shalom

traduction et notes : Claude Léostic, Afps

Source : France Palezstine
http://www.france-palestine.org/article906.html

 

Ce texte n'engage que son auteur et ne correspond pas obligatoirement à notre ligne politique. L'AFPS 59/62,  parfois en désaccord avec certains d'entre eux, trouve, néanmoins, utile de les présenter pour permettre à chacun d'élaborer son propre point de vue."

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