Nouveau
rapport d’Adalah : plus de 30 nouvelles lois promulguées par le
Parlement israélien depuis le 7 octobre ancrent l’apartheid et la
suprématie juive ethno-nationale
AURDIP, le 15 décembre 2025
Au cours des deux dernières années, le Parlement israélien a voté
des dizaines de lois dont l’effet cumulé est d’asseoir et d’approfondir
davantage le régime israélien d’apartheid et de répression sur tous les
Palestiniens qui sont sous son contrôle – en Israël et dans les
territoires palestiniens occupés (TPO). Le nouveau rapport d’Adalah, « Post- 7 octobre : Une Nouvelle Vague de Lois
Israéliennes anti-Palestiniennes » passe en revue la
législation principale votée entre le 7 octobre 2023 et le 27 juillet
2025. Ces lois couvrent une multiplicité de thèmes incluant la liberté
d’expression, la contestation et la pensée ; le droit à la
citoyenneté et la vie familiale ; l’égalité et les droits sociaux ;
et les droits des détenus et prisonniers. Ces nouvelles lois violent
fondamentalement les droits humains des Palestiniens.
Tandis que l’État a justifié ces nouvelles lois par le climat
politique en temps de guerre, cette législation s’enracine dans la structure
constitutionnelle d’Israël fondée sur la suprématie juive ethno-nationale
qui, à bien des égards, aboutit à des systèmes juridiques séparés pour
les Israéliens juifs et pour les Palestiniens. Ces lois reflètent et sont
la manifestation de la loi fondamentale de 2018 : L’État Nation du
Peuple Juif ; ainsi que l’a déclaré ce gouvernement dans ses
principes généraux, « le peuple juif a un droit exclusif et
inaliénable sur toute la terre d’Israël ». Depuis le 7 octobre 2023,
les autorités israéliennes ont utilisé la guerre pour accélérer ces
tendances et consolider la suprématie ethno-nationale juive à plus grande
échelle. Ce nouveau rapport prend la suite de l’exposé de position d’Adalah du 27 octobre 2024 ,
qui passait en revue huit projets de lois dont la plupart furent ensuite
entérinées comme lois. Les lois examinées dans ce rapport s’ajoutent aux
lois déjà documentées dans la base de données d’Adalah sur les lois
discriminatoires, portant le total à une centaine de lois
discriminatoires.
Base de données
d’Adalah sur les lois discriminatoires
Les
Tendances de la législation
Le rapport identifie plusieurs tendances législatives majeures.
Tout d’abord, il documente les nouveaux amendements et l’usage extensif
du cadre de l’anti-terrorisme, qui, en pratique, est appliqué presque
exclusivement aux citoyens palestiniens d’Israël (CPI) et aux habitants
palestiniens de Jérusalem Est. Des définitions vagues de termes tels que
« acte terroriste » et « organisation terroriste »
dans la loi anti-terroriste de 2016 et les amendements qui ont suivi,
sont devenus des outils-clé pour la suppression de la liberté
d’expression des Palestiniens, en particulier depuis octobre 2023. Une
autre tendance octroie des ressources étatiques considérables à des
réservistes juifs israéliens sous forme de nouveaux privilèges –
avantages fiscaux, prestations sociales, dans l’enseignement supérieur et
dans l’emploi – qui, par nature, excluent les citoyens palestiniens
d’Israël. Le rapport met aussi en évidence l’institutionnalisation de
mesures d’urgence temporaires, sans cesse renouvelées ou pérennisées, qui
permettent des violations largement répandues des droits des détenus et
des conditions à caractère punitif contre des prisonniers palestiniens
dans les prisons israéliennes.
Consolidation
de l’Apartheid et des systèmes de répression
Le rapport conclut que la législation israélienne consolide un
régime juridique duel qui privilégie les Israéliens juifs tout en violant
systématiquement les droits des Palestiniens. Pour autant, à la
différence de systèmes historiques de suprématie raciale ou religieuse,
comme ceux de l’Afrique du Sud de l’apartheid ou Jim Crow aux États-Unis,
la plupart des lois citées dans le rapport emploient un langage juridique
neutre. Leur histoire et leur application démontrent cependant un ciblage
systématique des Palestiniens.
Ces lois criminalisent l’expression politique légitime,
autorisent la déportation de familles (palestiniennes), empêchent la
réunification familiale (de Palestiniens), permettent le licenciement
d’enseignants (palestiniens), suppriment les prestations sociales (de familles
palestiniennes) si leurs enfants mineurs sont condamnés pour ce qui est
caractérisé comme des « infractions à la sécurité » (dont le
jet de pierre), étendent les pouvoirs de la détention et de la
détention prolongée, restreignent l’accès au conseil juridique et ferment
des organes de presse indépendants. Elles violent les principes
constitutionnels d’Israël comme ses obligations dans le cadre de traités
internationaux. Dans les TPO, elles contreviennent encore davantage aux
devoirs d’Israël en droit humanitaire international.
Le rapport se réfère à l’avis de juillet 2014 de la Cour
Internationale de Justice (CIJ) qui a déclaré illégale l’occupation
prolongée d’Israël et que la législation discriminatoire constitue une
violation de la prohibition de la ségrégation raciale et de l’apartheid
par l’Article 3 de la convention internationale pour l’élimination de
toute forme de discrimination raciale (CEDR). Il situe aussi ces
nouvelles lois dans le cadre du génocide en cours mené par Israël à Gaza,
dont les mesures réduisant les opérations de l’UNRWA et l’aide
humanitaire, ce qui est une violation directe des mesures provisionnelles
prescrites par la CIJ dans le cas Afrique du Sud vs Israël. D’autres
lois, comme la loi sur les combattants illégaux, permettent la détention
arbitraire et des disparitions forcées, contribuant ainsi à la répression
systémique des Palestiniens de Gaza emprisonnés en Israël. La fermeture
d’organes de presse comme Al-Jazeera sert à cacher des atrocités et à
empêcher le contrôle de la violence d’État.
Adalah a aussi documenté d’autres projets de loi en suspens,
dont beaucoup sont actuellement soumis au Parlement, dans la session qui
a démarré fin octobre. Leur adoption éroderait encore davantage la
participation démocratique et l’égalité. Ces projets de loi étendraient
les motifs de disqualification des partis et candidats arabes au
Parlement, interdiraient l’emploi d’enseignants titulaires de diplômes
d’institutions académiques palestiniennes, licencieraient du personnel
universitaire pour leurs idées politiques, consolideraient l’annexion de
la Cisjordanie par des changements juridiques et taxeraient le
financement d’ONG de défense des droits humains par des gouvernements
étrangers, entre autres. Un projet de loi distinct prescrit la peine de mort pour
le meurtre d’un citoyen israélien, au motif de « racisme ou
d’hostilité envers le public », « visant à nuire à l’État
d’Israël et à la renaissance du peuple juif dans sa patrie ».
Rassemblées, ces initiatives législatives révèlent que ce
gouvernement israélien et son parlement continuent à agir en se dérobant
aux engagements constitutionnels de l’État et au droit international,
renforçant ainsi un régime d’apartheid et approfondissant le déni du
collectif palestinien et des droits individuels des Palestiniens.
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