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DOSSIERS PRESSE

Le mur et la Cour internationale de La Haye

La nouvelle vie de la Ligne verte

Haaretz, 6 décembre 2003
par Aluf Benn
http://www.haaretz.com/hasen/spages/368622.html

Plus le conflit israélo-palestinien durera, et plus les positions sur les frontières définitives deviendront inflexibles. La position d'Israël, selon laquelle les frontières définitives avec les Palestiniens et les Syriens doivent être fixées par des négociations, s'érode progressivement. La position arabe, qui fait des frontières du 4 juin 1967 la base de toute négociation et de tout accord, gagne progressivement le soutien de la communauté internationale.

La controverse a propos du tracé de la clôture de sécurité a renforcé le statut de la Ligne verte. Les efforts d'Israël de construire la clôture a l'intérieur de la Cisjordanie ont déclenché de violentes réactions internationales, ses adversaires disant qu'il dévie de la ligne de 1967, présentée comme la frontière d'Israël. Dans la proposition par l'OLP aux Nations Unies de transférer la controverse à la Cour internationale de La Haye, les Palestiniens demandent la reconnaissance de la fin du conflit et une solution à deux États "sur la base des lignes du cessez-le-feu de 1967".

Le pacte de Genève appelle a des solutions similaires.
La Ligne verte a été fixée par les accords de cessez-le-feu conclus entre Israël et ses voisins a la fin de la Guerre d'indépendance en 1949. Ces accords stipulaient explicitement qu'il ne s'agissait pas d'une frontière politique, mais simplement d'une ligne de sécurité. Mais la réalité l'a pérennisée et en a fait la frontière d'un Etat d'Israël dont la souveraineté a été reconnue. Sur le front syrien, cette ligne a pour base la frontière internationale issue du Mandat britannique, avec quelques ajustements. Mais concernant la Cisjordanie et la Bande de Gaza, il n'existait aucune frontière reconnue, ce qui permettait à Israël d'affirmer que la Ligne verte ne l'obligeait en rien sur le plan juridique ou politique, et qu'elle ne constituait donc pas une base obligée pour de futurs accords.

Après la Guerre des six jours de 1967, le Conseil de sécurité des Nations Unies adopta la célèbre résolution 242, qui depuis est devenue la base des relations politiques entre Israël et ses voisins. La résolution reconnaissait le droit pour les États de la région de vivre dans des frontières "sures et reconnues", et sa version anglaise parlait de retrait "de territoires" (from territoiries") et non de tous les territoires. Israël considéra cela comme un grand succès, et depuis, a toujours maintenu que cette frontière était sujette à la négociation.

Les accords d'Oslo ont reconnu les termes de "Cisjordanie et Bande de Gaza", mais se sont abstenus de se référer directement aux lignes de 1967. Au cours de conversations avec les Palestiniens, sous le mandat d'Ehoud Barak, Israël a accepte d'établir sa frontière avec les Palestiniens sur la Ligne verte, mais ces propositions ont été rejetées et leur validité officielle n'a jamais dépassé les antichambres. Avec les Américains, un modus vivendi a été institué : les Américains étaient contre les colonies, et pénalisaient Israël a l'occasion, comme en coupant des lignes de crédit bancaire, mais n'intervenaient pas dans la construction de quartiers à Jérusalem Est, bien que ceux-ci soient au delà de la Ligne verte.

Depuis le déclenchement de l'actuelle Intifada, l'écart entre la réalité et la position de la communauté internationale s'est élargi. Israël a renforce son contrôle sur les territoires, en particulier en Cisjordanie, et mis en pièces l'autonomie palestinienne. En même temps, les États-Unis déclaraient leur soutien officiel a la création d'un Etat palestinien et publiaient la feuille de route, et cette proposition de règlement était reconnue par les résolutions 1397 et 1515 du Conseil de sécurité.

L'Union européenne est allée encore plus loin, en déclarant que la Ligne verte était la frontière reconnue, qui constituerait la base d'un futur accord. A la fin de 2001, l'Union européenne, dans la déclaration de Laken, reconnaissait toujours à Israël le droit de vivre dans "des frontières internationalement reconnues". Cependant, le tournant eut lieu en juin 2002, dans la déclaration de Seville, après l'opération Bouclier défensif, quand les Européens déclarèrent pour la première fois qu'il fallait mettre fin a l'occupation et qu'un Etat palestinien devait être créé "sur la base des frontières de 1967, avec, si besoin était, des ajustements mineurs".

La déclaration de Copenhague de décembre 2002 répétait que les "frontières de 1967" constituaient la base d'un accord. La déclaration de Salonique de juin 2003, qui concluait la fin de la présidence grecque de l'Union européenne, ignora les frontières, et se contenta d'une vague formule, apparemment pour récompenser Israël après le sommet d'Akaba.

Les Européens ont également agi pour officialiser la Ligne verte en se battant pour la taxation des produits israéliens en provenance des colonies. Ce combat a fini par être gagné, et Israël a accepté de marquer ces produits. La feuille de route ignore la localisation de la frontière, et ne s'y réfère qu'indirectement en réclamant "la fin de l'occupation qui a débuté en 1967", et en reconnaissant l'initiative saoudienne qui exige un retrait total d'Israël sur les frontières de 1967.

Israël a exprime des réserves à propos de la reconnaissance de l'initiative saoudienne. Le Premier ministre Ariel Sharon l'a a peine mentionnée. Le porte-parole israélien le plus en pointe contre la Ligne verte a été le député Gideon Saar, actuel chef du groupe parlementaire du Likoud de la coalition, qui a averti des dangers existentiels qui pèseraient sur Israël en cas de retrait sur les anciennes lignes.

La controverse sur la clôture de sécurité a de nouveau mis le problème sur le tapis. Colin Powell, au cours d'un entretien accorde a Washington Post il y a deux mois,  a déclaré de façon inattendue que, "si la clôture était construite sur une frontière reconnue, la Ligne verte, elle serait acceptable".  Israël a exigé des clarifications sur la position américaine, et les juristes du Département d'Etat ont dit à Powell que la Ligne verte n'était pas une frontière reconnue. Le 9 octobre, le porte-parole du Département d'Etat précisa que la déclaration du secrétaire d'Etat n'était pas "une déclaration juridique", mais seulement une description, et que les frontières devaient être déterminées par des négociations.

Le conseiller juridique du ministère des Affaires étrangères, Alan Baker, fait état depuis quelque temps du renforcement du statut des lignes de 1967 et de l'érosion de la position israélienne. Dans un avis juridique fourni au gouvernement, ainsi que dans ses contacts avec ses collègues étrangers, Baker explique que, d'après la résolution 242, la frontière doit être fixée par des négociations, et que la Ligne verte n'a jamais eu de statut officiel. Mais sa mission devient de plus en plus difficile.

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