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DOSSIERS PRESSE

Les accords de Genève

Qui a dit que les Palestiniens renonçaient au droit du retour ?
Par Ali Abunimah The Electronic Intifada
le 23 juillet 2003

(traduit de l'anglais par e.colonna)
http://electronicintifada.net/v2/article1741.shtml

Khalil Shikaki du Centre Palestinien de recherche en Politique et Etudes a été pris à parti par une foule en colère alors qu'il tenait récemment une conférence de presse annonçant les résultats d'un sondage effectué parmi un échantillon de 4500 réfugiés palestiniens au sujet du droit au retour. Dans son étude, Shikaki rapporte que seulement 10% des réfugiés insisteraient pour retourner en Israel et en devenir citoyens. Les soutiens d'Israel et ceux qui vouent de l'indifférence à ce droit dans une solution au conflit Palestino-israélien embrassent les conclusions.

L'ancien Secrétaire d'Etat adjoint américain Richard Murphy, dans un article avec David Mack dans le Herald International Tribune, s'est emparé de ce résultat pour proposer que la question des réfugiés soit résolue en invitant la communauté internationale " à aider à l'établissement définitif de réfugiés palestiniens plutôt dans un nouvel état de Palestine ou dans un troisième pays ". En échange, les USA paierait pour réinstaller en Israel, 200000 colons juifs illégaux des Territoires Occupés. Murphy et Mack restent silencieux sur les 200000 colons restants, concentrés autour de Jérusalem et on peut en déduire qu'ils ne bougeront pas d'où ils sont.

MJ Rosenberg du Forum Politique Israélien, de tendance travailliste a aussi bien accueilli le sondage de Shikaki, en disant : " Ses conclusions réfutent un des principaux leitmotivs des arguments anti israéliens et est (sic) une menace pour les militants " rejectionistes ". Les Palestiniens ne sont pas apparemment, décidés à revenir dans leur maisons qu'ils ont quittées depuis plus de 55 ans. Au contraire, ils reconnaissent la réalité d'Israel et le fait que la partition de la Palestine est définitive et permanente. Les groupes de terreur qui tentent non seulement de revenir à 1967 mais aussi à 1948, ne représentent pas l'opinion palestinienne. Essentiellement, peu d'adhérents souscrivent à leurs idées ". En conséquence, selon Rosenberg, les réfugiés qui insistent sur leurs droits élémentaires humains, d'une manière ou d'une autre, s'alignent avec " les groupes de terreur " et " les rejectionistes ".

Comment pourrait il être possible que durant des décennies, tout le monde - pas le moindre des réfugiés eux mêmes- pensait par erreur qu'accorder des droits à des millions de réfugiés palestiniens était la clé du conflit ? Comment maintenant est t-il possible qu'un simple et douteux sondage menace de faire disparaître le problème en entier derrière un écran de fumée ? Une vision plus approfondie de ce sondage aidera à clarifier le brouillard.

Shikaki n'a pas publié toute son étude mais seulement un large communiqué de presse mettant en valeur ses résultats clés. Cela rend difficile d'évaluer sa méthodologie. Cependant, dans le communiqué de presse, il présente largement la question centrale donnée aux personnes sondées et cela mérite d'être regardé attentivement. Il commence :

" Nous vous lirons maintenant une solution proposée au problème des réfugiés qui fut publiée dans des journaux palestiniens en lumière des négociations de Taba en janvier 2000. ensuite nous vous poserons quelques questions : "

" L'établissement d'un état palestinien dans la Cisjordanie et la Bande de Gaza, la reconnaissance de la Résolution 194 de l'ONU par Israel ou le droit au retour. Mais les deux parties accorderaient sur le retour qu'un petit nombre de réfugiés en Israel en accord avec un plan s'étendant sur plusieurs années. Chaque famille de réfugiés pourraient choisir une des options suivantes :

" (1) Retour en Israel en accord avec un quota annuel et devenir citoyen israélien ; (2) rester dans l'état palestinien qui sera établi en Cisjordanie et à Gaza et recevoir une compensation équitable pour les biens saisis par Israel et pour toute autre perte et souffrance ; (3) recevoir la citoyenneté palestinienne, retourner dans des zones désignées à l'intérieur d'Israel qui seraient échangées plus tard avec des zones palestiniennes comme une partie d'un échange territorial et recevoir une compensation ; (4) recevoir une compensation équitable pour les biens, pertes et souffrance et rester dans le pays d'accueil en recevant soit la citoyenneté de ce pays, soit la citoyenneté palestinienne ; (5) recevoir une compensation pour les biens, pertes et souffrance et émigrer dans un pays européen, USA, Australie ou Canada et obtenir la citoyenneté de ce pays ou la citoyenneté palestinienne. "

Le nombre de personnes ayant choisi l'option (1) se monte à 23% au Liban, 12% en Cisjordanie et Gaza et 5% en Jordanie.

Le problème avec ces options est qu'elles sont rédigées d'une telle manière pour produire un résultat où la plupart des Palestiniens choisissent de ne pas revenir.

Premièrement, le paragraphe d'ouverture affirme à priori que seulement un " petit nombre " de réfugiés sera en fait autorisé au retour et que ces quelques chanceux pourraient devoir attendre beaucoup d'années. Deuxièmement, la question offre un choix entre un retour et une compensation comme si les réfugiés auraient seulement droit à l'un ou à l'autre.

La Résolution de l'Assemblée Générale de l'ONU 194 de décembre 1948, qui applique le droit au retour des Palestiniens mentionne : " les réfugiés désirant retourner chez eux et vivre en paix avec leurs voisins seraient autorisés à le faire à une date favorable le plus vite possible et une compensation devrait être payée pour les biens de ceux qui ne choisissent pas de revenir et pour les pertes et dommages de biens qui, sous les principes des lois internationales et dans l'équité , devraient être réparés par les gouvernements et autorités responsables. "

Les maisons et les biens de beaucoup de réfugiés palestiniens ont été saisis ou détruits par Israel. Ce n'est pas moins vrai pour ceux qui peuvent opter de revenir comme ça l'est pour ceux qui ne le font pas. Ce qui signifie en pratique est que même ceux qui exercent leur droit au retour, ont légalement droit à des compensations pour des biens qui n'existent plus depuis longtemps, qui ont été endommagés ou qui ont été pris par Israel.

Pourtant, de la façon dont les options de Shikaki sont formulées, elles nient la compensation due à ces Palestiniens choisissant de retourner en Israel (bien que ceux optant de vivre en territoire israélien destiné à être échangé seraient éligibles). Par conséquent, pour les réfugiés, la perspective de revenir sans ressources et sans toit dans un état dans lequel ils sont en toute légalité, des citoyens de seconde catégorie, tend à être beaucoup moins réjouissante que les autres choix. Pourquoi ceux choisissant d'aller dans l'état palestinien, " recevraient t-ils une compensation équitable pour leurs biens saisis par Israël et pour toute autre perte et souffrance ", alors que ceux qui vont en Israël n'obtiendraient rien ? Leur souffrance a t-elle été moins sévère durant les dernières décennies ?

Des sondages de ce type comme celui de Shikaki ne mesurent pas l'opinion publique, ils la façonnent et dirigent la politique publique dans une direction prédéterminée.

Pourtant, même si cela s'avère vrai que seulement 10% de réfugiés cherchent à revenir dans l'Israël d'aujourd'hui, cela se traduit par environ 400 000 personnes -un nombre qu'Israël pourrait facilement absorber. Si c'est le cas, les Israéliens n'ont même pas la moindre excuse pour continuer à nier le droit au retour de ceux voulant l'exercer. Quel que soit le nombre réel de ceux voulant rentrer, les réfugiés n'ont pas être obligés ou sondés à distance. La paix doit être faite avec eux et non contre eux. Ce qui signifie en leur offrant de véritables choix qui reflètent leurs droits inaliénables.

Cet article a été publié en premier lieu dans The Daily Star (Toronto Canada)

Ali Abuminah est vice-président de l'Arab American Action Network à Chicago et co-fondateur d'ElectronicIntifada.net ( http://electronicintifada.net). Militant pour la justice et la paix au Proche-Orient, il intervient régulièrement en radio et à la tv notamment sur la BBC, CNN et Pacifica.   

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