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DOSSIERS PRESSE

Les accords de Genève

Une comparaison de trois rédactions
pour un Accord de Paix israélo-palestinien
Par Adam Keller Gush Shalom
26 novembre 2003

Remarques: Les trois documents comparés ici sont de longueur très différente: celui de Gush Shalom couvre trois pages, celui d'Ayalon-Nusseibeh ne comporte qu'une page (et est plus une déclaration de principes généraux qu'une rédaction d'accord de paix) et le document de Genève est de loin le plus long, couvrant 47 pages et entrant dans les détails techniques pour la mise en œuvre. Ceci doit être pris en compte en lisant la comparaison qui suit, et en particulier le manque de référence dans le document Ayalon-Nusseibeh aux nombreux points mentionnés dans les autres. Cela ne signifie pas que les rédacteurs n'aient pas été concernés par ces points.

Principes de Base

Les trois documents commencent tous en affirmant le principe de «Deux États pour Deux Nations». Le document Ayalon-Nusseibeh et le document de Genève incluent dans ce contexte l'obligation des Palestiniens à reconnaître le caractère juif d'Israël. (Ayalon-Nusseibeh : «Les deux côtés déclareront que la Palestine est le seul État du peuple palestinien et qu'Israël est le seul État du peuple juif». - Le document de Genève : «L'État d'Israël et l'Organisation de Libération de la Palestine (...) affirment que cet accord marque la reconnaissance du droit du peuple juif à un État et la reconnaissance du droit du peuple palestinien à un État, sans préjudice aux droits égaux des citoyens respectifs des Parties»). Le document de Gush Shalom n'inclut pas une telle référence.

Gush Shalom : le document mentionne comme base pour un accord les résolutions 242, 338 et 194 des Nations Unies.

Genève : le document de mentionne les résolutions 242, 338 et 1387 (qui n'existait pas encore au moment de la rédaction de la proposition de Gush Shalom) comme bases pour un accord global. 194 n'est pas mentionné dans le préambule du document de Genève, mais il est mentionné dans l'article spécifique sur le problème des réfugiés.

Ayalon-Nusseibeh : il n'y a aucune mention des résolutions dans le document.

Les trois documents incluent la déclaration que leur réalisation constitue la fin du conflit (le document de Gush Shalom stipule spécifiquement que les deux parties feront un rapport commun aux Nations Unies au sujet de l'achèvement de cet accord).

Les Frontières

Dans les trois documents, les frontières entre les deux États sont basées sur les frontières du 4 juin 1967, avec une possibilité d'échange de territoire. Le document Ayalon-Nusseibeh et le document de Genève stipulent spécifiquement que l'échange se fera selon un ratio de 1:1, alors que le document de Gush Shalom déclare que «l'échange de territoire peut prendre effet après un accord entre les deux parties». (Le ratio de l'échange a été un des problèmes qui a causé l'échec de la Conférence de Camp David en 2000, où le premier ministre Ehoud Barak avait proposé un échange au ratio de 9:1 en faveur d'Israël).

Alors que le document de Gush Shalom et celui d'Ayalon-Nusseibeh ne font aucune proposition concrète sur l'échange de territoire, le document de Genève dessine une frontière exacte au centimètre près, dont la démarcation a été le sujet de négociations précises, prolongées et provocant des crises entre les rédacteurs israéliens et les rédacteurs palestiniens.

Genève : dans le document sur Internet, il y a une liste détaillée des colonies qui seraient annexées à Israël et qui font partie de l'accord proposé (dont les colonies principales ultra-orthodoxes, Beitar-Illit et Modi'in-Illit/Kiryat Sefer qui sont situées toutes deux près de la Ligne Verte. Mais leur inclusion est sans doute destinée à gagner le soutien des parties ultra-orthodoxes).

Les territoires israéliens qui seraient données aux Palestiniens en échange sont pour la plupart près de la Bande de Gaza, afin d'augmenter les territoires déjà surpeuplés. Ce sont des terres fertiles en continuité avec la Bande, à la différence de la proposition faite à l'époque de Camp David, qui avait été de donner aux Palestiniens les Sables de Halutza, qui sont une zone désertique et sans continuité avec la Bande de Gaza.

Continuité entre la Cisjordanie et la Bande de Gaza

Gush Shalom : le document déclare: «Une grande route sera construite entre la Cisjordanie et la Bande de Gaza et elle appartiendra à l'État de Palestine.»

Ayalon-Nusseibeh : le document dit: «L'État palestinien aura une connexion entre ses deux zones géographiques, la Cisjordanie et la Bande de Gaza.»

Genève : le document a un long article détaillé qui définit un couloir entre la Cisjordanie et la Bande de Gaza qui sera «sous souveraineté israélienne», mais «sous administration palestinienne», et toute personne passant dans ce couloir sera assujettie à la loi palestinienne. Le territoire du corridor n'est pas inclus dans le calcul d'échange de terre.

Le document de Genève inclut également des arrangements pour que la circulation civile israélienne puisse utiliser des «routes désignées en Palestine» (route 443 qui connecte Tel Aviv et Jérusalem dont une grande partie passe par la Cisjordanie, la route Jérusalem-Tibériade qui passe par la vallée du Jourdain et la route Jérusalem-Ein Gedi). Les Israéliens recevront des «permis spéciaux pour utilisation de routes désignées». Les routes seront sous souveraineté et administration palestinienne, mais il y aura des patrouilles de forces multinationales (vraisemblablement pour intervenir en cas d'incidents impliquant ces Israéliens de passage, bien que ce ne soit pas explicitement dit dans le texte. L'accord d'Oslo avait assigné ce rôle à des patrouilles mixtes israéliennes et palestiniennes qui, malgré un succès partiel, ne pouvaient pas éviter d'être considérées par les Palestiniens comme étant une forme de continuation de l'occupation).

Calendrier pour mettre fin à l'occupation

Gush Shalom : «en moins d'un an».

Ayalon-Nusseibeh : ne fait pas de référence à un calendrier spécifique.

Genève : le retrait doit se faire en deux étapes: la première après neuf mois, et la deuxième après une autre période de 21 mois. Après la deuxième étape, tout le territoire sera sous la souveraineté totale palestinienne, mais Israël pourra maintenir une petite présence militaire dans la Vallée du Jourdain pendant encore 36 mois. Deux stations israéliennes d'alerte préventive resteront indéfiniment en territoire palestinien, mais les Palestiniens pourraient demander une réouverture des discussions sur cette question après 10 mois.

La démilitarisation de la Palestine

Gush Shalom : «L'État de Palestine s'engage à s'abstenir de s'armer avec des armes offensives lourdes pendant 25 ans. Cette obligation sera nulle et non avenue si les traités de paix sont signés entre Israël et les États Arabes.»

Ayalon-Nusseibeh : «L'État palestinien sera démilitarisé et la communauté internationale garantira sa sécurité et son indépendance.»

Genève : «La Palestine sera un État non militarisé, avec une force de sécurité puissante.»

Parer l'activité terroriste

Gush Shalom : «Les deux parties s'engagent à combattre le terrorisme et les initiatives terroristes organisées par un État contre l'autre État, ses habitants et ses institutions.»

Genève : les deux parties doivent «s'abstenir d'organiser, d'encourager ou de permettre la formation de forces irrégulières ou de bandes armées, dont les mercenaires et les milices dans leurs territoires respectifs et doivent empêcher leur création. (...) Les Parties feront en commun et unilatéralement et ce dans leurs territoires respectifs, les efforts continus et intensifs contre toute forme de violence et de terrorisme.»

Ayalon-Nusseibeh : ne fait pas de référence spécifique sur ce sujet.

L'espace aérien

Gush Shalom : «Les deux parties arriveront à un accord en ce qui concerne l'espace aérien de chacun.»

Genève : a demandé à Israël de faciliter le trafic aérien palestinien selon la Convention de Chicago sur l'Aviation Civile Internationale, mais les forces aériennes israéliennes pourront indéfiniment «utiliser l'espace souverain aérien palestinien dans le but de formation».

Le passage des frontières

Gush Shalom : «L'État de Palestine aura le contrôle souverain sur tous ses passages de frontières, sur terre, mer et air.»

Ayalon-Nusseibeh : le document ne fait pas de référence sur le sujet.

Genève : «Toutes les frontières seront contrôlées par des équipes communes» de la force multinationale et par les Palestiniens, force qui empêchera l'entrée en Palestine «de toutes les armes, matériel ou équipement qui sont en contravention avec les stipulations de cet Accord». Israël pourra maintenir une «présence invisible» au passage des frontières pendant 30 mois et un contrôle télécommandé de ces passages pendant encore deux années. Israël pourra demander à tout moment une nouvelle inspection par la force multinationale et les Palestiniens quand elle estimera qu'un contrôle a été insuffisant.

Contacts militaires avec l'extérieur

Gush Shalom : «Les deux Parties s'engagent à prévenir l'entrée dans leurs territoires de toute force armée militaire. Toute contravention à cette disposition par l'un ou l'autre État pourra autoriser à l'autre État le droit à prendre les mesures requises pour sa défense.»

Ayalon-Nusseibeh : le document ne fait pas de référence à ce sujet.

Genève : La Palestine et Israël «s'abstiendront de se joindre, d'assister, de promouvoir ou de coopérer avec toute coalition, organisation ou alliance à caractère militaire ou sécuritaire, dont les objectifs ou les activités incluraient le lancement d'une agression ou tout autre acte d'hostilité contre l'autre État.»

Colonies

Gush Shalom : «Les habitants des colonies situées dans un territoire qui va faire partie de l'État de Palestine seront évacués de ce territoire avant la fin de l'occupation israélienne.»

Ayalon-Nusseibeh : «Après l'établissement des frontières acceptées, aucun colon ne restera dans l'État palestinien.»

Genève : «L'État d'Israël aura la responsabilité de réinstaller les Israéliens habitant dans le territoire souverain palestinien hors de ce territoire.»

Alors que le document de Gush Shalom écrit: «Les colonies seront transférées intactes aux autorités palestiniennes, sans que les bâtiments ou autres propriétés indéplaçables soient endommagés. La propriété évacuée par les colons sera considérée comme faisant partie de la contribution israélienne à la réhabilitation des réfugiés palestiniens», le document de Genève contient une provision très similaire mais plus détaillée et le document Ayalon-Nusseibeh ne fait pas de référence spécifique sur cet aspect.

Implication internationale et une force multinationale

Il y a des différences évidentes sur ce sujet entre le document de Genève et les deux autres.

Gush Shalom : il y a une disposition disant que «le comité international qui a été accepté contrôlera la mise en œuvre de cet accord et servira d'arbitre dans le cas de différences d'opinion» et une implication internationale est mentionnée dans le contexte de la question des réfugiés. (Report ultérieur).

Ayalon-Nusseibeh : de même, le document fait référence à une implication internationale principalement en ce qui concerne les réfugiés et fait également référence (sans entrer dans les détails) à la communauté internationale qui garantira la sécurité et l'indépendance de l'État démilitarisé palestinien sans entrer dans les détails.

Genève : d'un autre côté, dans ce document, l'implication internationale est beaucoup plus directe et importante, non seulement en ce qui concerne les réfugiés, mais aussi dans tous les aspects de la mise en œuvre de la paix israélo-palestinienne et dans le maintien de cette paix. La mise en valeur de l'implication internationale constitue clairement un élément central et essentiel dans la perception de la paix qu'ont les rédacteurs de cet accord.

D'après le document de Genève, «un Groupe d'application et de vérification» (GAV) sera créé, qui inclura les partenaires de l'actuel Quartette: les États-Unis, la Fédération de Russie, l'Union Européenne et les Nations Unies, ainsi que «d'autres parties, régionales et internationales, pour lesquelles les Parties doivent donner leur accord». Le GAV maintiendra de façon permanente ses quartiers généraux à Jérusalem, une force multinationale sur le terrain, et établira un dispositif permanent pour traiter les plaintes de chaque Partie envers l'autre en cas de violation de l'accord. Presque chaque article dans le document inclut une référence détaillée sur le rôle du GAV se rapportant à la mise en œuvre de cet article.

Le rôle de la Force Multinationale sera varié et considérable: contrôle rapproché du retrait israélien, protection de l'intégrité territoriale de l'État de Palestine qui ne doit pas avoir sa propre armée, contrôle des passages de frontières de Palestine, aide pour mettre en vigueur les mesures contre le terrorisme, maintien d'une présence permanente sur le complexe du al-Haram al-Sharif/Mont du Temple avec le personnel de sécurité palestinien et, dans la Vieille ville de Jérusalem, avec les forces de police israéliennes et palestiniennes.

Le document de Genève considère le GAV comme un partenaire actif dont le rôle ne se restreint pas à répondre aux recours des Parties mais qui pourrait initier des actions qu'il considérerait comme nécessaires sur la base de rapports provenant de son propre personnel sur le terrain. La façon dont le document de Genève est écrit semble indiquer que les rédacteurs voulaient autant que possible anticiper les problèmes qui pourraient survenir et fournir des solutions par avance. Et les solutions incluent habituellement l'implication active du GAV (une leçon probablement apprise suite à l'effondrement d'Oslo).

Une question essentielle doit être mentionnée. Dans toutes les autres sphères, le document de Genève envisage une implication internationale qui sera exercée par le GAV, et qui inclut beaucoup d'acteurs divers internationaux. Mais toutes les questions de services de renseignements et le partage d'informations en ce qui concerne le terrorisme, sont assignés à un comité trilatéral qui, avec les Israéliens et les Palestiniens, n'inclut que des représentants des États-Unis. Le document ne donne aucune explication pour cet arrangement exceptionnel.

Jérusalem

Dans les trois documents, la base d'une solution pour Jérusalem est une souveraineté israélienne sur les quartiers juifs et une souveraineté palestinienne sur les quartiers arabes. Chaque État établira sa capitale dans la partie de Jérusalem qui est sous son contrôle. (Ceci découle des principes du «Clinton Parameters de Décembre 2000 - voir: http://www.fmep.org/documents/clinton_parameters12-23-00.html)

Gush Shalom : mentionne que «le quartier juif de la Vieille ville fera partie de l'État d'Israël et sera rattaché à son territoire. Les quartiers musulmans, chrétiens et arméniens de la Vieille ville feront partie de l'État de Palestine».

Ayalon-Nusseibeh : le document ne mentionne pas spécifiquement comment diviser la Vieille ville.

Genève : la division est similaire à celle de Gush Shalom sauf en ce qui concerne la «Tour de David» historique qui se trouve dans le quartier arménien et qui sera sous souveraineté palestinienne, mais sous administration israélienne. Le document donne aussi à Israël la souveraineté sur la route située au sud des remparts de la Vieille ville afin de créer une continuité territoriale jusqu'au quartier juif. (L'idée que cette route donne à Israël une telle continuité territoriale a été mentionnée par le président Arafat lors d'une réunion avec une délégation de Gush Shalom à Gaza quelques années auparavant).

Il faut noter que les cartes détaillées concernant la souveraineté divisée de Jérusalem, cartes qui sont sur le site web du document de Genève, n'incluent pas Har Homa parmi les «quartiers juifs» qui passeront sous l'autorité israélienne, mais que celle-ci passera aux Palestiniens. Le Dr Menachem Klein, qui est l'expert principal sur Jérusalem parmi les rédacteurs israéliens de cet accord, a noté que la colonie de civils israéliens de Har Homa a débuté seulement après que le président Clinton ait publié les «paramètres» cités ci-dessus et après que ces paramètres avaient été acceptés par les deux parties. Le document note également que les quartiers juifs à Jérusalem qui ont été créés au-delà de la Ligne Verte et qui seront annexés à Israël, sont comptés dans le calcul de l'échange de territoire.

Le document de Gush Shalom note que «la municipalité de la Jérusalem palestinienne et la municipalité de la Jérusalem israélienne établiront un conseil municipal basé sur le principe d'égalité, afin de gérer les services municipaux partagés». Un paragraphe équivalent dans le document de Genève mentionne «un Comité de Coordination et de Développement» chargé de «coopérer et de coordonner les services municipaux» avec des sous-comités dans les domaines du Planning et de la Division en Zones, de l'Infrastructure Hydrologique, du Transport, de l'Environnement, du Développement Économique, des Services de Police et d'Urgence et de la Vieille Ville. La différence entre l'administration commune des services municipaux selon le document de Gush Shalom et la coordination entre les services administrés séparément dans le document de Genève est plus que verbale et semble refléter une différence fondamentale sur la question de liberté de mouvement. (Report ultérieur)

Ayalon-Nusseibeh : ne fait pas de référence spécifique sur ce sujet.

Genève : d'après le document, «les Jérusalémites palestiniens qui sont actuellement des résidents permanents d'Israël perdront ce statut après le transfert à l'Autorité Palestinienne de ces zones dans lesquelles ils résident» mais «des mesures intérimaires» seront appliquées afin de préserver «les droits socio-économiques accumulés des habitants de Jérusalem-Est».

Les autres documents ne font pas de référence à ce domaine.

Liberté de Mouvement

Ayalon-Nusseibeh : le document dit que «Jérusalem sera une ville ouverte, la capitale de deux États», sans élaborer davantage.

Gush Shalom : le document déclare explicitement que «il n'y aura pas de barrières ou d'obstacles qui empêcheraient un passage restreint entre les deux parties de la ville. Les deux parties établiront des check-points frontaliers, s'ils le décident, à l'entrée et à la sortie de la Ville».

Genève : par contre, ce document définit «un régime de frontière» qui sera implanté à Jérusalem et qui prendra en compte «les besoins spécifiques de la ville. (C'est-à-dire, le déplacement des touristes et l'utilisation intensive des passages de frontières, y compris les dispositions pour les Jérusalémites)». Lors d'une conférence au Club Tzavta à Tel Aviv, le Dr Klein a confirmé que cela pouvait être interprété comme entraînant la construction d'une barrière frontalière entre les deux parties de Jérusalem: «pas une barrière comme celle que Sharon est en train de construire, mais une barrière frontalière vivante et fonctionnant entre deux États souverains qui vivent en paix l'un avec l'autre mais qui n'ont pas encore atteint le même degré de proximité que les États-Unis avec le Canada ou la Hollande avec la Belgique», explique-t-il. (Cité de mémoire, mais pas nécessairement mot à mot).

Dans le document, la liberté de mouvement ne s'applique pas à tout Jérusalem, mais seulement à la Vieille Ville qui est entourée de remparts. Le document consacre un très long chapitre très détaillé à la Vieille Ville et au régime spécial qui la gouvernera. D'après le document, la division de souveraineté dans la Vieille Ville sera marquée par «un plan visible et codé en couleur» mais sans barrières physiques, et dont l'ordre public et sécuritaire sera pris en charge par des unités de police palestinienne, israélienne et multinationale travaillant ensemble, en même temps que par un comité spécial trilatéral des services de sécurité palestiniens, israéliens et américains qui devront s'occuper des menaces d'attaques terroristes. Dans la Vieille Ville, contrairement aux autres parties de Jérusalem, le document définit une administration commune israélo-palestinienne des services municipaux plutôt qu'une coordination de services séparés. Certaines des portes de la Vieille Ville seront sous contrôle palestinien et d'autres sous contrôle israélien. Toute personne entrant dans la Vieille Ville pourra se déplacer librement à l'intérieur de ses frontières mais ne pourra sortir qu'en passant par les portes contrôlées par la même souveraineté qui l'a laissé entrer. Le document mentionne la possibilité que «les Parties examineront la possibilité d'étendre ces arrangements au-delà de la Vieille Ville et pourront s'accorder sur un tel élargissement». Apparemment, les rédacteurs de cet accord considèrent la Vieille Ville de Jérusalem comme un terrain favorable pour des expériences qui pourront être étendues plus tard.

Ayalon-Nusseibeh : le document déclare que «aucune des deux parties n'exercera de souveraineté sur les lieux saints. L'État de Palestine sera désigné comme étant le gardien du al-Haram al-Sharif, au bénéfice des musulmans. Israël sera le gardien du Mur des Lamentations au bénéfice des juifs.

Dans le document de Genève et celui de Gush Shalom, les deux États auront la souveraineté et pas seulement la garde des lieux saints mentionnés ci-dessus. Le document de Genève inclut des dispositions détaillées concernant la préservation de l'ordre public et sécuritaire sur le complexe du al-Haram al-Sharif/Mont du Temple par la présence d'un personnel de sécurité palestinien et multinational. Ces derniers seront composé du GAV et d'autres membres après accord des parties, y compris des membres de l'Organisation de la Conférence Islamique (OIC) - ce qui implique qu'au moins une partie de la présence multinationale sur cet important site musulman viendra de pays musulmans.

Les trois documents stipulent qu'il n'y aura pas de fouilles archéologiques ou autres sur le complexe du al-Haram al-Sharif/Mont du Temple sans le consentement des deux Parties. Le document de Gush Shalom applique cette disposition également aux fouilles sur le complexe du Mur des Lamentations (cette question n'est pas théorique: dans les années 70 et 80, les fouilles archéologiques israéliennes au Mur des Lamentations ont été la raison des tensions et de controverses constantes). De son côté, le document de Genève donne à Israël la souveraineté non seulement sur le Mur des Lamentations mais aussi sur le tunnel sous ce mur, dont l'ouverture en septembre 1996 a provoqué des émeutes et des confrontations sanglantes.

Le document de Genève prévoit également une administration israélienne sur le cimetière juif du Mont des Oliviers, sujet qui n'est pas mentionné dans les deux autres documents.

Les réfugiés palestiniens

Sur cette question, il y a une différence manifeste entre le document Ayalon-Nusseibeh et les autres deux documents.

Ayalon-Nusseibeh : le document utilise le terme «Droit au Retour», mais lui donne l'interprétation suivante: «les réfugiés palestiniens ne retourneront que dans l'État de Palestine. Les juifs ne retourneront que dans l'État d'Israël», ce qui rend ce document très controversé du côté palestinien.

Gush Shalom : le document déclare «qu'Israël reconnaît le principe du Droit au Retour en tant qu'un droit humain fondamental» et stipule que «afin de guérir la blessure historique et comme acte de justice, Israël permettra le retour dans son territoire d'un certain nombre de réfugiés, qui sera décidé d'un commun accord. Les personnes pourront revenir selon un quota annuel raisonnable pendant une période de temps qui n'excédera pas 10 ans».

Genève : dans le document, le terme «Droit au retour» n'apparaît pas du tout, un point sur lequel les partenaires israéliens n'ont absolument pas voulu céder pendant leurs discussions avec leurs interlocuteurs palestiniens. À la place, apparaît le terme de «choix d'un lieu de résidence permanent» (par les réfugiés). On offre aux réfugiés les options de résidence suivantes: l'État de Palestine, des zones en Israël qui vont être transférées à la Palestine dans le cadre d'échange de territoire, des pays tiers, l'État d'Israël ou les pays d'accueil actuels.

D'après cette conception, l'arrivée de réfugiés palestiniens qui viendraient vivre dans l'État d'Israël n'est pas considérée comme un «retour» mais plutôt comme l'absorption de réfugiés semblable à celle dans les pays tiers pour lesquels il n'y a pas de revendication. En conséquence, le nombre de réfugiés qu'Israël acceptera sera déterminé par Israël sur la base de «la moyenne du nombre total de réfugiés [admis] par les différents pays tiers».

Les trois documents stipulent qu'un fonds international fournira une compensation financière aux réfugiés palestiniens. Le document de Gush Shalom déclare que «Israël contribuera pour une partie proportionnelle à ce fonds, en prenant en compte la valeur de la propriété palestinienne qui est restée en Israël». Un même principe guide le document de Genève, mais là, un processus détaillé explique qu'une «Commission d'Experts» déterminera en six mois la valeur de la propriété palestinienne restée en Israël en 1948. Cela constituera «la somme globale israélienne pour le fond international», après quoi «aucune autre revendication financière résultant du problème des réfugiés ne pourra être invoquée contre Israël».

Le document Ayalon-Nusseibeh déclare seulement en des termes généraux qu'Israël et l'État palestinien initieront un fonds international et y contribueront.

Genève : dans le document, l'implication internationale est plus importante que dans les autres documents, y compris en ce qui concerne les réfugiés. Le document déclare que non seulement un fonds international sera créé, mais aussi «une Commission Internationale qui aura la pleine et exclusive responsabilité» sur tous les domaines concernant les réfugiés. La Commission devrait inclure, à l'exception d'Israël et de la Palestine, également les Nations Unies, les États-Unis, l'UNRWA, les pays d'accueil arabes, l'Union Européenne, la Suisse, le Canada, la Norvège, le Japon, la Banque Mondiale, la Fédération de Russie et d'autres».

D'après le document, le processus de résolution de la question des réfugiés prendra cinq ans, période à l'issue de laquelle les réfugiés, même quand ils refuseront d'accepter une des options offerte par l'accord, perdront leur statut de réfugiés et l'UNRWA, qui les a pris en charge depuis 1948, sera démantelé et ses fonctions seront transférés aux pays d'accueil.

Somme toute, une approche plutôt dure qui risque de transformer les réfugiés qui s'opposent à l'accord et qui refusent d'abandonner leur revendication individuelle, en des vagabonds sans État et sans aucun statut légal.

Au sujet du document qui offre aux réfugiés le choix de résider «dans des zones en Israël qui seront transférées à la Palestine dans le cadre d'échange de territoire», plusieurs remarques méritent d'être faites:

Premièrement, en définissant leur frontière, les initiateurs du document de Genève ont inclut le territoire à côté de la région de Hébron, une zone où a existé le village palestinien de Duheimeh jusqu'en 1948. Pendant l'occupation de Duheimeh par l'armée israélienne en fin 48, beaucoup de civils ont été tués et aucune communauté israélienne n'a jamais été établie sur les ruines du village déserté. Par conséquent, le transfert de ce territoire à la Palestine permettra aux réfugiés de Duheimeh, contrairement aux autres villages, de réaliser pleinement le droit au retour dans le sens de reconstruction de leur village sur le site exact de sa situation d'origine, ce qui pourrait devenir un événement profondément symbolique.

En outre, l'extension de la Bande de Gaza placera dans les mains de Palestiniens des terres qui avaient appartenu avant 1948 à des Palestiniens vivant aujourd'hui dans des camps de réfugiés de Gaza. Mais étant donné la surpopulation de ces camps, on pourrait aussi choisir de construire à cet endroit de nouvelles villes pour les réfugiés en général.

Finalement, il faut noter qu'en mettant la frontière dans la zone de Latrun, le document de Genève laisse aux mains d'Israël toute la route principale Tel Aviv - Jérusalem, mais donne aux Palestiniens l'enclave de Latrun d'avant 1967, donnant ainsi la possibilité aux trois villages détruits par Israël en juin 1967 d'être reconstruits.

Responsabilité historique et mémoire du passé

Gush Shalom : dans le document, «Israël reconnaît sa responsabilité centrale concernant la création de cette tragédie lors des guerres de 1948 et 1967».

Rien de cela n'est repris dans les deux autres documents, et les participants israéliens du document de Genève mettent actuellement l'accent sur l'absence d'une telle clause en ce qui concerne le responsabilité historique, comme étant l'une de leurs victoires lors des négociations avec leurs partenaires palestiniens.

Ayalon-Nusseibeh : le document inclut «la reconnaissance de la souffrance et des conditions difficiles des réfugiés palestiniens».

Gush Shalom : le document détaille: «Les deux parties établiront une «commission vérité» composée d'historiens (israéliens, palestiniens et internationaux) qui examineront les causes précises qui ont amené la création du problème sous tous ses aspects, et émettra un rapport objectif et concluant dans les trois ans. Ce rapport sera incorporé dans les manuels scolaires des deux États.»

Genève : dans le document, il y a un programme de même nature: «Les Parties encourageront et assureront la promotion et le développement de la coopération entre leurs institutions appropriées et les sociétés civiles, en créant des forums pour échanger les récits historiques et mettre en valeur la compréhension mutuelle concernant le passé. Les Parties encourageront et faciliteront les échanges afin de diffuser une meilleure appréciation de ces récits respectifs, dans les domaines de l'éducation formelle et informelle, en offrant les conditions pour des contacts directs entre les écoles, les institutions éducatives et la société civile (...) Ces programmes pourront développer des moyens pour commémorer de façon appropriée les villages et les communautés qui existaient avant 1949.»

Libération de prisonniers et les détenus

Genève : dans le document, tous les prisonniers et les détenus palestiniens aux mains des Israéliens seront libérés sans exception, en trois étapes: tous les prisonniers emprisonnés avant le 4 mai 1994 (quand l'Accord d'Oslo est entré en vigueur) seront immédiatement libérés au moment de la signature de l'accord... ainsi que tous les détenus administratifs, prisonnières et prisonniers malades. Les autres prisonniers seront libérés après 18 mois, sauf ceux dont les noms seront spécifiquement mentionnés dans l'annexe à l'accord (qui vraisemblablement inclut beaucoup de prisonniers qui entrent dans le critère élargi israélien comme ayant «du sang sur les mains»); ce groupe de prisonniers sera libéré dans les cinq années après que l'accord soit entré en vigueur.

Les deux autres documents n'ont pas de clause sur les prisonniers.

D'après le programme Uvdah de la deuxième chaîne de télévision israélienne qui a diffusé le 18 novembre un matériel authentique filmé pendant les discussions qui ont conduit au document de Genève, la clause sur les prisonniers a été le sujet d'un débat animé et prolongé entre les partenaires israéliens et palestiniens. À un certain moment, Yossi Beilin a été entendu déclarant que si un tel accord avait été proposé dans le gouvernement au moment où il était ministre de la Justice, il s'y serait opposé. Mais Sufian Abu-Zaida, qui a mené les discussions des Palestiniens sur le sujet des prisonniers, a insisté sur le fait qu'il serait impossible d'arriver à un accord qui mettrait fin au conflit en laissant des prisonniers palestiniens derrière les barreaux israéliens.

Armes de destruction massive

Genève : dans le document, «Israël et la Palestine travailleront de concert avec leurs voisins et avec la communauté internationale pour construire un Proche-Orient stable et sur, libre de toutes les armes de destruction massive, qu'elles soient conventionnelles ou non, dans le contexte d'une paix stable générale et durable, caractérisée par la réconciliation, la bonne volonté et la renonciation à l'utilisation de la force. Dans ce but, les Parties travailleront ensemble pour établir un régime de sécurité régionale.»

Les autres deux documents ne font pas référence à ce sujet.

L'eau

Gush Shalom : Le document dit: «Les ressources d'eau de toute la terre entre la rivière du Jourdain et la Mer Méditerranée appartiennent aux deux parties. Un Comité Suprême israélo-palestinien sera nommé et sera responsable des ressources d'eau et de sa distribution. L'eau sera allouée équitablement et légitimement sur la base de la proportion numérique des habitants des deux États. Les deux Parties coopéreront sur des projets pour le développement de ressources d'eau additionnelles comme la désalinisation de l'eau de mer.»

Genève : Une clause sur ce sujet important est absente du document. Dans le texte, tel qu'il a été présenté au public israélien et palestinien, cette lacune est reconnue, et le texte déclare que ce problème a été passé à une équipe d'experts qui n'ont apparemment pas fini leur travail.

Ayalon-Nusseibeh : le document ne mentionne pas le problème de l'eau.

Les textes originaux en anglais se trouvent sur :

Gush Shalom : http://www.gush-shalom.org/archives/peace.html
Ayalon-Nusseibeh :
http://www.mifkad.org.il/eng/PrinciplesAgreement.asp
Initiative de Genève :
http://www.heskem.org.il/Heskem_en.asp

Adam Keller
Traduit de l'anglais par Ana Cleja

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